Notre Village

Comédie courte 3F/3H

Et si un simple changement de nom devenait une affaire politique et sentimentale explosive ?

Accordez-nous moins d’une demi-heure de lecture et plongez votre public une comédie piquante et actuelle, taillée pour le monde d’aujourd’hui (même si vous avez peu de moyens).

À jouer à distance ou sur scène !



Avant de vous en dire plus, on a 3 questions rapides à vous poser :

🆘 Vous en avez assez des pièces déconnectées du réel ?
🆘 Vous fuyez les comédies qui se contentent de divertir sans faire réfléchir ?
🆘 Vous n’en pouvez plus de ces pièces qui tirent en longueur ?

Si vous avez répondu oui à au moins deux questions, alors lisez vite ce qui suit !

Voici le résumé de Notre Village :
Dans une petite commune récemment fusionnée, les tensions entre habitants atteignent leur paroxysme lorsque la question du nom du village est mise sur la table. En pleine visio-conférence, Emmanuelle Saverne, médiatrice nommée par le Préfet, tente de rétablir l’ordre face à des personnalités hautes en couleur. Entre affrontements acerbes, rivalités historiques et quiproquos techniques, cette comédie dévoile avec brio les absurdités de nos conflits locaux et humains.

En accédant au texte intégral de Notre Village, vous obtiendrez un fichier PDF de 36 pages pour un poids ultra-réduit de 402 Ko, téléchargeable sur votre ordinateur, votre tablette, votre téléphone, et imprimable sur n’importe quel support. La mise en page vous permettra de noter sur le texte toutes les indications et notes de régie que vous jugerez utiles.

Avec Notre Village, vous découvrirez :

✅ Une comédie satirique qui présente au public des conflits de politique locale qu’il connaît bien.
✅ Des personnages variés et hauts en couleur : chaque interprète a l’occasion de marquer le public.
✅ Un décor minimaliste : une pièce conçue pour être jouée en visio ou en présentiel, simple à mettre en scène.
✅ Des rôles équilibrés, donnant à tout le groupe des partitions d’égales importances.
✅ Une fin inattendue et savoureuse : un dénouement qui renverse toutes les attentes et laisse le public hilare.

Intéressé(e) ?

Téléchargez gratuitement le texte intégral de Notre Village

et plongez votre public dans un huis clos captivant où le rires et surprises s’entremêlent.

Attention : cette pièce est déconseillée aux Compagnies qui refusent la représentation irrévérencieuse des pouvoirs locaux.


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Questions fréquentes sur Notre village

Cette comédie parle-t-elle vraiment de politique ?

Pas au sens partisan ! Notre Village s’amuse plutôt des travers humains : rivalités d’ego, malentendus, besoin de reconnaissance… La politique locale n’est qu’un terrain de jeu pour dévoiler nos absurdités collectives

Faut-il beaucoup de moyens techniques pour la jouer ?

Pas du tout. La pièce a été écrite pour être jouée avec un décor minimaliste, en visio ou sur scène. Un ordinateur, quelques accessoires, et l’énergie du groupe suffisent à faire éclater tout son potentiel comique.

Est-ce une comédie « de situation » ou « de caractère » ?

Les deux ! Les situations absurdes naissent des caractères tranchés : chaque personnage défend son identité, son territoire, son prestige… et tout cela finit par exploser dans un chaos jubilatoire

Quel type de public appréciera Notre Village ?

Tous ceux qui aiment rire de la bêtise ordinaire, des réunions qui tournent mal et des egos surdimensionnés. La pièce amuse, mais elle interroge aussi — et laisse rarement indifférent.


Extrait de Notre Village

Personnages

Emmanuelle Saverne.

Jean-Louis Châlon-Naquet.

Olivier Blettery.

Élisabeth de Cize.

Laurent Forgeard.

Nadège Forgeard.

Le décor

Les six personnages ont chacun un écran distinct. Emmanuelle Saverne et Nadège Forgeard sont connectées depuis leur lieu de travail. Les autres appellent depuis leur domicile.

Les écrans d’Emmanuelle Saverne, Jean-Louis Châlon-Naquet, Olivier Blettery et Laurent Forgeard sont allumés. Cependant celui d’Emmanuelle Saverne se contente d’afficher : « Emmanuelle Saverne ». Un long silence durant lequel les trois hommes visibles hésitent, se raclent la gorge, toussent, etc.

L. Forgeard. Je voudrais rajouter quelque chose à l’ordre du jour. 

J. L. Châlon-Naquet. Pas maintenant.

L. Forgeard. Quand, alors ? 

J.L. Châlon-Naquet. Quand la réunion aura commencé.

L. Forgeard. Elle n’a pas commencé ? 

J.L. Châlon-Naquet. Non. Mais il le faudrait, peut-être ?

E. Saverne. Un instant, je vous prie.

L. Forgeard. Qui parle ?

J.L. Châlon-Naquet. Bon, on commence.

O. Blettery. Élisabeth arrive. Mais Stéphane et Didier ne peuvent pas.

L. Forgeard. Je me demande ce que fait Nadège.

O. Blettery. Un dossier urgent.

L. Forgeard. Qu’est-ce que t’en sais ?

O. Blettery. … je suppose…

J.L. Châlon-Naquet. Je déclare ouvert ce conseil municipal extraordinaire.

E. Saverne. M. Châlon-Naquet, s’il vous plaît.

O. Blettery. Qui parle ?

E. Saverneapparaissant à l’image. Emmanuelle Saverne, médiatrice nommée par M. le Préfet. J’ai été mandatée pour présider cette réunion. Voilà Mme de Cize.

L’écran d’E. DE CIZE apparaît.

E. de Cizeapparaissant soudain, par ailleurs en conversation téléphonique. —Des yeux de braise et une voix de velours, je te dis ! Moi, il me… il me… (S’apercevant que la réunion a commencé, à voix basse .) Je suis obligée de te laisser. Bye. Et, tu n’oublies pas, hein ? Des macarons au citron. Non. Non, je te dis, au citron ! Voilà ! (Elle raccroche. Haut .) Excusez-moi, un impératif professionnel.

J.L. Châlon-Naquet. Seul le maire peut présider le conseil municipal.

E. Saverne. Ce n’est pas un conseil municipal. Juste une réunion. 

J.L. Châlon-Naquetcondescendant. Et comment s’appelle une réunion avec le maire, les adjoints et les conseillers municipaux ? Un conseil municipal ! On ne vous apprend pas ça, à Sciences-Po ?

E. Saverne. Mme Forgeard nous rejoint. 

L’écran de N. FORGEARD apparaît.

N. Forgeardapparaissant soudain. Vous me voyez ?

L. Forgeard. —Oui.

N. Forgeard. Vous me voyez, là ?

L. Forgeard. —Oui.

N. Forgeard. Vous m’entendez ?

L. Forgeard. —Oui.

N. Forgeard, plus fort. Est-ce que vous m’entendez ?

L. Forgeard O. Blettery et E. de Cize. —Oui !

L. Forgeard. —On t’entend, chérie !

N. Forgeard. Pourquoi personne me répond ? 

L. Forgeard, plus fort. —On t’entend !

N. Forgeard. Ils sont où ? Comment on fait pour ? … Ah… ça doit être ça…

L’écran de N. FORGEARD disparaît.

E. Saverne. Bien… Mme Forgeard nous rappelera certainement plus tard. 

O. Blettery. Ce logiciel de visio, il n’est pas très intuitif, mais des formations existent. Ainsi, tenez, moi, par exemple, j’ai fait un stage de trois jours et maintenant, je maîtrise.

E. Saverne, avec une pointe d’ironie. Nous en sommes ravis, M. Blettery. Nous allons poursuivre. M. Châlon-Naquet, je vous remercierais de me laisser faire mon travail. 

J.L. Châlon-Naquet, sec. Et moi je vous somme de me laisser accomplir ma fonction.

E. Saverne, le calme incarné. Je suis ici la seule habilitée à conduire cette réunion.

J.L. Châlon-Naquetbouillant. Vous n’avez aucune autorité. 

E. Saverne, administrative. Vous avez lu l’arrêté préfectoral. 

J.L. Châlon-Naquet, serrant les dents. Je m’en contrefous, de votre arrêté. 

E. Saverne, neutre. J’en prends bonne note. 

J.L. Châlon-Naquet. Qu’il vienne me voir, le Préfet, s’il a des couilles.

E. Saverne. M. le Préfet est à l’instant-même en réunion avec le secrétaire d’État à l’aménagement du territoire, le directeur régional de l’environnement et le général Audubon-Wilson de la…

J.L. Châlon-Naquetla coupant. Tout cela est une manœuvre de déstabilisation politique. Je suis maire de Sainte-Suzanne-Bouquetin-le-Bel, et je vais présider ce conseil municipal, point à la ligne.

E. Saverne. Vous n’allez rien présider du tout.

J.L. Châlon-Naquet. Qui m’en empêchera ?

E. Saverne. Moi. 

O. Blettery. Oh ! Je demande un vote. Votons pour élire un président de séance.

J.L. Châlon-Naquet. Je suis notaire ! Et je suis payé pour vous dire que tout ça, c’est illégal !

E. Saverne. Pour la clarté des débats, je vous demanderai, en qualité de présidente de séance, de ne pas parler les uns sur les autres.

J.L. Châlon-Naquethors de lui. Assez ! Vous n’êtes présidente de rien ! Vous n’avez été élue par personne ! 

E. Saverne. M. Châlon-Naquet, si vous perturbez la bonne tenue des débats, je serai obligée de vous sortir.

J.L. Châlon-Naquetaffichant un sourire méprisant. Me faire sortir de mon conseil municipal ? Et par cette gonzesse ? Nan mais, chérie, t’as fumé la moquette ou quoi ?

L’écran de J.L. CHÂLON-NAQUET disparaît.

E. de Cize. Qu’est-ce qui se passe ?

E. Saverne. J’ai sorti M. Châlon-Naquet.

O. Blettery. Sorti ?

E. Saverne. Mis en salle d’attente.

E. de Cize. Quelle salle d’attente ?

E. Saverne. J’ai suspendu sa connexion.

E. de Cize. Quoi ? Mais c’est odieux ! Vous n’avez pas le droit ! Jean-Louis est notre maire ! À Sainte-Suzanne, tout le monde est derrière lui !

L. Forgeard. Pas à Bouquetin-Le-Bel…

E. de Cize. —Ça, bien sûr…

E. Saverne. À présent, nous allons peut-être pouvoir…

E. de Cize, la coupant. J’exige que vous réintégriez immédiatement M. Châlon-Naquet.

E. Saverne. M. Châlon-Naquet a démontré sa volonté d’obstruction.

E. de Cize. Il a simplement souhaité faire appliquer la loi !

E. Saverne. Appliquer la loi ? C’est ce que je suis en train de faire. Bien, comme je vous le disais…

E. de Cize, la coupant. Blablabla ! Je refuse de vous écouter tant que M. Châlon-Naquet ne sera pas réintégré !

E. Saverne. Mme de Cize, votre qualité d’adjointe ne vous autorise pas à…

E. de Cize, la coupant. Blablabla ! Je n’entends rien !

E. Saverne. Mme de Cize, vous vous mettez dans une position difficilement…

E. de Cize, la coupant. Blablabla ! Quelqu’un parle ?

L’écran d’E. DE CIZE disparaît à son tour.

O. Blettery. Vous… vous l’avez sortie ?

L. Forgeard, souriant en coin. Bien joué…

E. Saverne. J’ai été mandatée par M. le Préfet pour mener cette réunion. Et je suis déterminée à atteindre cet objectif. Quelqu’un d’autre souhaite-t-il perturber les échanges ? (Bref silence.) Bien, dans ce cas, poursuivons. (Consultant ses papiers.)Voyons… euh… M. Forgeard ? 

L. Forgeard. Oui.

E. Saverne. C’est vous qui avez sollicité l’intervention préfectorale.

O. Blettery. —C’est toi ?

L. Forgeard. Moi et un collectif de citoyens.

E. Saverne. Vous avez indiqué que le maire ne vous laissait pas vous exprimer lors des conseils municipaux.

O. Blettery, bas. —Balance…

E. Saverne. Tendance autoritaire qui a été confirmée par plusieurs témoignages… et que j’ai pu moi-même constater à l’instant. Je vous donne donc la parole. 

L. Forgeard. Merci. Il y a cinq ans, Sainte-Suzanne et Bouquetin-le-Bel étaient deux villages distincts. Leurs conseils municipaux respectifs ont décidé la fusion des deux entités en un seul et même village. Sans aucune concertation avec la population, la commune nouvelle a été baptisée Sainte-Suzanne-Bouquetin-le-Bel.

E. Saverne. Tout cela est parfaitement connu de nos services.

L. Forgeard. Nous sommes plusieurs habitants historiques de Bouquetin-le-Bel à estimer que ce nom ne correspond pas à l’identité de notre territoire. Nous voulons le changer.

O. Blettery. Encore cette histoire…

E. Saverne. Vous voulez changer le nom du village ?

L. Forgeard. En effet. Nous voulons un nouveau nom pour notre village.

O. Blettery. Et vous proposez quoi ?

L. Forgeard. Bouquetin-le-Bel-Sainte-Suzanne.

O. Blettery, après un silence. C’est une blague ?

E. Saverne. Que je comprenne bien : vous voulez changer le nom de votre commune ?

L. Forgeard. C’est ça.

E. Saverne. Et remplacer Sainte-Suzanne-Bouquetin-le-Bel par Bouquetin-le-Bel-Sainte-Suzanne ?

L. Forgeard. Voilà.

O. Blettery. Tu plaisantes ?

L. Forgeard. J’ai l’air ?

O. Blettery. Tu fais partie du club théâtre…

E. Saverne. M. Hostein est connecté.

O. Blettery. Stéphane ? Mais je croyais que…

Un nouvel écran apparaît avec cette mention : « Stéphane Hostein ».

E. Saverne. M. Hostein, bonsoir. (UNE VOIX répond : « bonsoir »). Merci de nous rejoindre. (LA VOIX répond : « tout le plaisir est pour moi ».)

L’écran « Stéphane Hostein » laisse apparaître J.L. CHÂLON-NAQUET.

E. Saverne. M. Châlon-Naquet ?

J.L. Châlon-Naquetjubilant. Eh oui ! Vous ne vous débarrasserez pas de moi comme ça… Je connais toutes les subtilités de ce logiciel de visio…

E. Saverne. Cela est tout à fait contraire au référentiel des bonnes pratiques des échanges interpersonnels professionnels en distanciel…

J.L. Châlon-Naquet. Et si vous nous parliez en français ?

E. Saverne. Cela mérite une explication mais… euh… M. Guichemerre nous rejoint.

O. Bletteryexprimant un doute. Didier ? 

Un nouvel écran s’affiche avec cette mention : « Didier Guichemerre ».

E. Saverne. M. Guichemerre, bonsoir. (UNE VOIX répond : « bonsoir »). Merci de nous rejoindre. (LA VOIX répond : «veuillez m’excuser de mon retard ».)

L’écran « Didier Guichemerre » laisse apparaître E. de DE CIZE, affublée d’une perruque et d’une moustache postiche.

L. Forgeard. Qu’est-ce c’est que ce carnaval ?

E. Saverne, après un silence. M. Guichemerre ?

E. de Cize, prenant la voix la plus grave possible. Euh… oui… c’est bien moi… Didier Guichemerre…

E. Saverne. Hum… bon… Mme de Cize, on vous a reconnue…

E. de Cize, jouant toujours le jeu. Je ne comprends pas.

J.L. Châlon-Naquet. Élisabeth, pas la peine, on t’a démasquée…

E. DE CIZE se dévoile.

E. de Cize, enlevant perruque et postiche, piteuse. Désolée… c’était une idée de mon grand… (S’adressant à quelqu’un hors-champ.) Je t’avais dit que ça ne marcherait pas…

E. Saverne. M. Châlon-Naquet, Mme de Cize, je suis disposée à vous laisser participer à la réunion. 

J.L. Châlon-Naquetironique. Vous êtes trop bonne…

E. Saverne. À la condition expresse de vous engager à me laisser mener les débats, et à permettre à chacun de s’exprimer. (Silence.) Vous m’avez entendue ?

J.L. Châlon-Naquet. Oui, oui…

E. Saverne. Et ?

J.L. Châlon-Naquet. Et quoi ?

E. Saverne. Et vous vous y engagez ?

J.L. Châlon-Naquet, approuvant. Hin hin…

E. Saverne. Dites-le.

J.L. Châlon-Naquet. Pardon ?

E. Saverne. Dites « je m’y engage ».

J.L. Châlon-Naquet, éclatant. Ça va ! Vous n’êtes pas maîtresse d’école et je ne suis pas votre élève !

E. Saverne. En ce cas, je vous coupe.

J.L. Châlon-Naquet, immédiatement mâté. Je m’y engage.

E. Saverne. Mme de Cize ?

E. de Cize. Je m’y engage.

E. Saverne. Bien. Il semble que nous repartons sur de bonnes bases. Ah… Mme Forgeard nous rappelle.

L. Forgeard. Pas trop tôt !

L’écran de N. FORGEARD apparaît.

N. Forgeard, apparaissant. Ah ! Chéri ! Je suis contente de pouvoir te parler. Je n’ai pas pu prendre ton antidiahrréique. Ils n’en avaient plus, désolée. T’en as pas trop mis partout ?

L. Forgeard. Euh… chérie…

N. Forgeard. Mais Val m’a dit, le mieux, ça reste le riz. Alors fais-toi 100g de riz et blinde-toi. Avec ça, ta petite chiassounette devrait s’en aller, mon cœur…

L. Forgeard, gêné. Chérie, tout le monde t’entend !

N. Forgeard. Mais… je ne vois que toi…

L. Forgeard. Parce que je viens de parler !

N. Forgeard, se décomposant. Ah… alors tout le monde m’a… ?

E. Saverne. Bonsoir Mme Forgeard. Vous êtes connectée avec l’ensemble du groupe.

N. Forgeard. Bonsoir… Oh j’y comprends rien à cette appli de visio… Au boulot j’utilise DigitMeet alors… Mais… euh… comment je fais pour tous vous voir ? Ah ça y est, j’ai compris !

L’écran de N. FORGEARD disparaît de nouveau.

E. Saverne. Bien… je ne doute pas que Mme Forgeard ne se reconnecte un peu plus tard. M. Forgeard, voici plusieurs mois que vous souhaitez déposer une demande de changement de nom pour votre village.

J.L. Châlon-Naquet. Ne me dites pas qu’on va remettre sur le tapis ce délire abracadabrantesque ?

E. Saverne, avec une nuance de menace. M. Châlon-Naquet, je vous en prie. M. Forgeard, vous avez la parole.

L. Forgeard. Merci.

J.L. Châlon-Naquet, souriant en coin. Si t’as besoin de PQ, je peux t’en livrer, j’ai du stock.

L. Forgeard. Très drôle.

J.L. Châlon-Naquet. Je disais ça pour aider.

L. Forgeard, ironique. Bien sûr. (Sérieux .) Bon… La commune nouvelle, on sait pourquoi M. Châlon-Naquet a voulu la faire : la subvention.

J.L. Châlon-Naquet. C’est vrai. Je nous ai fait gagner de l’argent et j’en suis fier !

L. Forgeard. Un argent gagné aussitôt dépensé en études scientifiques fumeuses !

J.L. Châlon-Naquet. En trois ans, trois nouveaux cours d’eau sont apparus sur la commune. Tu voulais que je regarde ça sans rien faire ?

E. Saverne. Justement, à ce sujet, nous avons…

L. Forgeard, la coupant. Nous sommes beaucoup à vouloir changer le nom de la commune nouvelle. Pour nous, il est nécessaire de débaptiser le village de son nom de Sainte-Suzanne-Bouquetin-le-Bel, pour le rebaptiser Bouquetin-le-Bel-Sainte-Suzanne.

J.L. Châlon-Naquet, rigolard. Qu’est-ce que vous dites de ça, Saverne ? Ça, c’est un projet politique !

E. Saverne. Euh… très bien… nous vous écoutons, M. Forgeard.

L. Forgeard. Tout d’abord, à Bouquetin-le-Bel, nous sommes les plus nombreux. 

J.L. Châlon-Naquet, souriant. Là-dessus, je ne peux pas vous contredire…

E. de Cize. On le sait : vous, les Beaubouquetinois, vous vous reproduisez comme des lapins !

L. Forgeard. Vous voyez Mme Saverne, ça fait des années que les Suzannais nous méprisent. Ils se mettent en avant à nos dépens. Il faut que ça cesse. Parce que c’est nous, les Beaubouquetinois, qui faisons vivre le village, grâce à notre agriculture.

E. de Cize. Vous feriez bien de sortir de temps en temps de votre étable, ça vous éviterait de dire des inepties !

L. Forgeard. Nous, on trime, mais tous les équipements, les ruelles rénovées, les nouveaux éclairages, c’est pour qui ? Sainte-Suzanne ! Ça fait des années que les Beaubouquetinois se font baiser par les Suzannais. 

E. de Cize. Oh ! Surveillez votre langage ! Mais quel manque d’éducation !…

L. Forgeard. Le mépris, toujours le mépris ! Et légitimé par quoi ? Rien ! Parce que y a rien, à Sainte-Suzanne. 

O. Blettery. Rien ? Sainte-Suzanne a un patrimoine historique inestimable ! Ainsi, tenez, moi, par exemple, j’habite dans un manoir du XVIIIe et…

E. de Cize, le coupant. Vous osez dire rien ? Et notre couvent, placé sous le patronage de la Sainte ?

L. Forgeard. Votre couvent, ça fait longtemps qu’il est fermé !

E. de Cize. À qui la faute ? Aux Beaubouquetinois qui l’ont mis à sac en 1905 !

L. Forgeard. Mme Saverne, vous avez devant vous les Suzannais dans toute leur splendeur ! Que de la gueule ! Excusez-moi…

E. de Cize. Oh ! Tenir de tels propos au sujet d’un couvent qui a été un centre spirituel pendant plusieurs siècles !

L. Forgeard. Faites-moi rire ! Il m’en a parlé, mon arrière-grand-père, des bénédictines de Sainte-Suzanne… de belles catins !

E. de Cize. Oh ! 

J.L. Châlon-Naquet, outré. C’est un blasphème !

L. Forgeard, avec provocation, sur l’air d’ « Au Clair de la lune ». À Sainte-Suzanne, mon amie Perrine / J’ai vu de bell’s dames, des bénédictines / Ell’s sont charitables, mais aussi coquines / Ell’s aiment prier Dieu, et sucer des…

E. de Cize; le coupant. Assez ! 

J.L. Châlon-Naquet, furieux, sur l’air d’ « À la Claire Fontaine ». À Bouquetin-le-Bel / M’en allant promener / J’ai vu bouse si laide que mon nez s’est bouché / Il y a longtemps que tu pues / Tu ne vaux pas mieux qu’un…

E. Saverne, le coupant. M. Châlon-Naquet ! Maintenant que tout le monde a chanté, nous allons peut-être pouvoir revenir à un échange normal ? 

J.L. Châlon-Naquet. —C’est pas moi qui ai commencé…

E. Saverne. Je le sais. Quelle est la position de la majorité municipale concernant la demande de M. Forgeard ?

J.L. Châlon-Naquet. Notre position est claire : c’est de la foutaise !

L. Forgeard. Et pourquoi ?

J.L. Châlon-Naquet. D’abord, parce que « Bouquetin-le-Bel », c’est moche. 

L. Forgeard. Moche ?

E. de Cize. Non seulement c’est laid, mais c’est ridicule !

O. Blettery. Je suis désolé, Laurent, mais « Bouquetin-le-Bel » c’est pas vendeur. Les gens n’ont aucune envie d’habiter dans un village qui s’appellerait « Bouquetin-le-Bel ». « Sainte-Suzanne », par contre, ça fait tout de suite plus…

J.L. Châlon-Naquet. On a déjà été bien gentils en conservant « Bouquetin-le-Bel » dans le nom de la commune nouvelle. 

E. de Cize. On aurait dû le supprimer et ne garder que « Sainte-Suzanne », je l’ai toujours dit…

J.L. Châlon-Naquet, à L. Forgeard. Contrairement à ce que tu sembles dire, Sainte-Suzanne bénéficie d’un patrimoine culturel irremplaçable. Mais bon, manifestement, ça te passe au-dessus du sifflet.

***

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