Comédie grinçante pour une femme et un homme
Et si une simple visite réveillait des secrets que vous croyiez enfouis ?
Accordez-nous moins d’une heure de lecture et plongez votre public dans une comédie à deux personnages, à la fois percutante et pleine d’humour noir (même si vous avez peu de moyens).
Un affrontement sans concession.
Avant de vous en dire plus, on a 3 questions rapides à vous poser :
🆘 Vous en avez assez des pièces où les dialogues manquent de mordant et d’intensité ?
🆘 Vous fuyez les intrigues trop prévisibles où rien ne vous surprend plus ?
🆘 Vous ne supportez plus les personnages fades ?
Si vous avez répondu oui à au moins deux questions, alors lisez vite ce qui suit !
Voici le résumé de L’Imparfait du subjectif :
Louis, directeur d’une institution catholique, s’apprête à passer une soirée tranquille après une journée difficile. Mais l’arrivée inattendue d’Isa, une femme de son passé, bouleverse tous ses plans. Entre révélations et confrontations, les souvenirs ressurgissent, distordus par le temps et les émotions. Une vérité inattendue émerge dans ce duel captivant, où le rire et la tension s’entremêlent.
En accédant au texte intégral de L’Imparfait du subjectif, vous obtiendrez un fichier PDF de 48 pages pour un poids ultra-réduit de 521 Ko, téléchargeable sur votre ordinateur, votre tablette, votre téléphone, et imprimable sur n’importe quel support. La mise en page vous permettra de noter sur le texte toutes les indications et notes de régie que vous jugerez utiles.
Avec L’Imparfait du subjectif, vous découvrirez :
✅ Une pièce concise et puissante : un format idéal pour captiver votre public sans temps mort.
✅ Des rôles tout en démesure : un défi pour deux comédiens prêts à explorer les limites de leur art.
✅ Un décor minimaliste : un fauteuil, un guéridon, quelques verres, pour une mise en scène simple et efficace.
✅ Une intrigue riche en surprises : des dialogues incisifs qui tiennent le spectateur en haleine jusqu’à la dernière réplique.
✅ Un regard acerbe sur la mémoire et les relations humaines : cette pièce provoque une prise de conscience sur les aspects les plus noires de l’humanité
Intéressé(e) ?
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et laissez votre public explorer les méandres du passé et de la mémoire dans cette comédie dramatique captivante.
Attention : déconseillé aux Compagnies chatouilleuses sur la religion catholique.
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La pièce a été créée par Les Débutants en novembre 2023. Pour plus d’information, lisez l’article de blog que nous avons consacré à cette production.
Questions fréquentes sur L’Imparfait du subjectif
Est-ce vraiment une comédie ?
Oui, mais une comédie noire. On rit de ce qui dérange, pas de ce qui distrait. L’Imparfait du subjectif joue sur l’ambiguïté entre la cruauté et le ridicule des rapports humains — un humour qui surgit quand les masques tombent.
Deux personnages seulement… ça suffit pour tenir une heure ?
Largement. C’est un duel, pas un duo. Chaque échange est une mise à feu. Les silences, les regards et les sous-entendus sont aussi importants que les répliques. Les comédiens n’ont pas une minute pour respirer — ni le public.
Est-ce difficile à jouer ?
Oui, mais c’est un plaisir rare. Les deux rôles sont exigeants, parce qu’ils oscillent sans cesse entre la comédie, la tension et l’émotion. Les acteurs doivent accepter d’être vulnérables, parfois odieux, souvent brillants.
Faut-il un décor particulier ?
Non. Un fauteuil, un guéridon, deux verres — et l’espace mental fait le reste. L’intérêt est dans la confrontation, pas dans le mobilier. C’est une pièce pensée pour se jouer partout : salle, café-théâtre, salon.
Le public en sort comment ?
Généralement secoué, mais heureux. On rit de ce qu’on reconnaît, même quand c’est dérangeant. L’Imparfait du subjectiflaisse un goût de vérité grinçante — celle qui fait réfléchir longtemps après la dernière réplique.
Extrait de L’Imparfait du subjectif
Le décor
Un fauteuil Voltaire. Juste à côté : un guéridon sur lequel sont posées bouteilles et verres.
Personnages
Louis.
Isa.
Louis, off. Chérie ! Chérie ? (Paraissant .) Chérie ? Chérie, je suis là ! Mais où elles sont ? (Téléphonant .) Allô chérie ? Vous êtes où ? Pourquoi tu chuchotes ? Ah c’est vrai ! j’avais complétement oublié… Au fait, Mong a repassé ma chemise blanche ? Et tu lui as dit qu’elle n’oublie pas de… Ah oui, pardon… c’est commencé depuis longtemps ? Trois quarts d’heure ? (Après une courte réflexion.) Le temps d’arriver, ce sera fini. Oui, je suis déjà rentré, le conseil de discipline n’a pas traîné. Le jeune homme a écopé d’une exclusion définitive. J’espère que ça lui mettra du plomb dans la tête. De toute façon, vis-à-vis des parents d’élèves, je ne pouvais pas faire autrement. Ça fait trois ans que j’essaie de redorer le blason de Sainte-Blandine, mais c’est pas encore gagné. Tu le sais très bien… c’est à Notre-Dame des Victoires que tout le monde veut inscrire ses mômes, pas chez nous. D’ailleurs Yves me tacle assez souvent sur le sujet avec des vannes du style : « J’ai encore dû refuser 15 inscriptions, alors je te les ai envoyées ». Tu sais comment on nous appelle, dans le diocèse ? La poubelle de Notre-Dame des Victoires… Je t’assure… C’est pour ça qu’il fallait que ce petit con soit viré. Excuse-moi pour le petit con, mais c’en est un. Je te raconterai… Hein ? C’est l’Ave Maria qui commence ? Je te laisse. Vous serez là d’ici une bonne heure ? Très bien. À tout à l’heure, ma chérie, Je t’embr… (Il s’interrompt.) Allô ? Allô ? (Dépité, il range son téléphone et s’agenouille, mains jointes. Au Ciel .) Merci, mon Dieu, pour ce conseil de discipline efficace. Merci également pour ce court moment de calme, après cette journée houleuse. (Revenant à lui .) Et maintenant, profitons un peu !… (Il s’assoit dans le fauteuil.) Ah… c’est bon… (Il débouche la bouteille de whisky.) C’est pas très raisonnable… (Au Ciel .) Mon Dieu, Vous en pensez quoi ? Oui, c’est juste, si l’alcool était si mauvais que ça, Jésus n’aurait pas changé six jarres d’eau en six jarres de vin ; je suis bien d’accord avec Vous. (Il se sert un verre de whisky. Au Ciel .) À la Bonne Vôtre. (Il s’apprête à boire lorsque son téléphone sonne. Regardant son écran, crispé .) Yves ? Qu’est-ce qu’il me veut, celui-là ? (Répondant, tout miel .) Yves ! Mais quelle bonne surprise ! Comment vas-tu, mon grand ? Pas du tout, c’est toujours un plaisir de t’avoir au téléphone… Je pensais justement à toi. Je me disais « ça fait trop longtemps que je n’ai pas eu des nouvelles de Yves » … (Perdant son sourire .) Quoi ? Comment ça, tu ouvres le Bachelor à la rentrée prochaine ? Putain, Yves, on s’était mis d’accord : on avait dit qu’on faisait le Bachelor à Sainte-Blandine, mais qu’on vous réservait la moitié des places. De toute façon, t’as jamais pu me blairer. Oh arrête ! Déjà, en terminale, tu adorais me mettre des bâtons dans les roues. Mais si… je m’en souviens très bien ! … (Désignant son cerveau .)C’est gravé là. Quoi ? Attends… Répète ? « Le passé, c’est la meilleure invention du présent » ? Je ne comprends pas. J’invente, peut-être ? Je réécris le passé, c’est ce que tu veux dire ? Ah, c’est censé me faire réfléchir… Et toi, est-ce tu as réfléchi ? Quoi, une opportunité ? Mais j’en n’ai rien à cirer, moi, de ton opportunité ! Oh, je te parle comme je te parle… Franchement, c’est ce que j’appelle un joli coup de pute. (Au Ciel .) Pardon, mon Dieu. (À Yves .) Tu l’emporteras pas au paradis… Ça te fait rire ? Alors écoute ça : tu sais que Magellan veut venir chez moi ? Si ! Il en peut plus de ton management de sous-cardinal. Il est prêt à faire une croix sur la prépa. Je le reçois en entretien jeudi. J’avais demandé à Élodie de lui… Élodie, mon assistante, je lui avais demandé de donner un rendez-vous à Magellan pour lui dire non poliment, mais finalement, plus j’y pense, et plus je me dis que je vais accepter sa candidature. Et tu sais ce qui va se passer ? Si Magellan vient chez moi, ta prépa se casse la gueule. Tu veux que je te mette les points sur les i ? En clair : tu ouvres ton Bachelor, je nique ta prépa. Ah j’ai pas le droit ? Révise ton Ancien Testament, ça s’appelle la loi du Talion, ducon. (Il raccroche. Au Ciel .) Pardon mon Dieu mais, ce que fait Yves, Vous avouerez que c’est pas très chrétien… (Soudain, se regard accroche l’accoudoir du fauteuil.) Regardez-moi ça… ça part comme un rien, ça… camelote…
Isa paraît.
Louis. Qui êtes-vous ?
Isa. Une seconde…
Louis. Comment Une seconde ? C’est une propriété privée, ici.
Isa. Je sais…
Louis. Et vous vous en vantez ? Apprenez que vous êtes chez moi.
Isa. Je le sais aussi…
Louis. Décidément, vous savez tout ! Alors vous savez sans doute que vous êtes en train de commettre une effraction ?
Isa. Une effraction, tout de suite les grands mots…
Louis. Ce n’est pas de la grandiloquence, mais de l’exactitude.
Isa. C’est bien toi, il n’y a pas de doute…
Louis. Non mais dites donc ? Je ne vous permets pas de me tutoyer.
Isa. C’est pas vrai… Tu m’as pas reconnue ?
Louis. Vous reconnaître ? Qu’est-ce que ça veut dire ?
Isa. Allez, Louis…
Louis. Mais comment… comment connaissez-vous mon prénom ?
Isa. C’est moi, Isa.
Louis. Isa ? Désolé, mais je ne vois vraiment pas qui vous…
Isa. Isabelle. Isabelle Carouge. Terminale L.
Louis, avec sidération. Isa ? Non… c’est pas possible…
Isa. Et si…
Louis. Mais c’est fou !… Mais qu’est-ce qui s’est passé ?
Isa. Vingt ans.
Louis, la regardant et semblant comprendre. Ah mais c’est ça !
Isa, prête à s’offusquer. Quoi, c’est ça ?
Louis, essayant de se rattraper. Eh ben c’est ça… c’est ça que je t’ai pas reconnue tout de suite. Le temps que je… (Il fait le signe de fils qui se connectent.)
Isa, résignée. Bon allez, dis-le, j’ai changé.
Louis. Mais non…
Isa. Mais si…
Louis, avec autorité. Je te dis que non ! Oh !… Tu n’as pas changé, ce n’est pas le terme. Tu as carrément muté. Je te débarrasse ? (Il prend la veste d’Isa.)
Isa. En tout cas toi, tu n’as pas changé. Tu ne vieillis pas.
Louis. C’est ce que je me dis tous les jours. Et plus les jours passent, plus j’ai l’impression de ne pas vieillir. En fait, ce n’est pas moi qui vieillis, ce sont les autres qui rajeunissent. D’ailleurs, à chaque fois que je mets le journal télé, le gars ou la fille est encore plus jeune que la veille. Ils les prennent à quel âge, maintenant ? 14 ans ?
Isa. Je te retrouve… Tu me fais toujours autant marrer. Tu te souviens ? tu m’imitais Albin dans la grande scène de la biscotte. Je m’y croyais !
Louis, imitant Michel Serrault. « Ah zut ! J’ai encore cassé ma biscotte ! »
Isa, entrant dans le jeu. C’est pas grave, Albin !
Louis, arrêtant de jouer, la regardant, gêné. Mais non, Isa, c’est moi, Louis.
Isa, gênée également et changeant de sujet. Qu’est-ce que c’est bien rangé chez toi.
Louis. Quand j’arrive le soir, la maison me dit : « range-moi, s’il te plaît, range-moi ! Mets les objets dans les tiroirs, les couverts dans les placards, les papiers dans les corbeilles, passe la paille de fer et la cireuse, fais-moi briller ! » (Regardant Isa qui le regarde bizarrement.) La maison ne me dit pas vraiment ça. C’est une image.
Isa, regardant autour d’elle. En tout cas, c’est impressionnant…
Louis. C’est vrai, tu aimes ?
Isa. Tu sais que j’adore les films d’horreur, donc là je suis comblée !…
Louis. Comment as-tu trouvé le chemin ?
Isa. Tu es dans l’annuaire.
Louis, souriant jaune. Ah oui ! J’avais oublié…Quand on est dans l’annuaire, c’est ça qu’est bien, n’importe qui peut passer à l’improviste…
Isa. Tu es proprio ?
Louis. Oui. Enfin, ma femme.
Isa. Tu es marié ?
Louis. Ce sont des choses qui arrivent.
Isa. Je la connais ?
Louis. Oui.
Isa. Qui est-ce ?
Louis. Anne-Sophie.
Isa. Anne-Sophie ?
Louis. Anne-Sophie de Jonzac.
Isa. Anne-So ? Cette mijaurée qui faisait du polo ?
Louis. C’était du golf. Anne-Sophie vaut mieux que les moqueries dont on la gratifiait.
Isa. On était jeunes.
Louis. On était cons.
Isa, approuvant. Ça… Mais tu es seul ?
Louis. Anne-So et les filles sont sorties.
Isa. Les filles ?
Louis. Nous avons deux filles.
Isa. Deux ?
Louis. Des jumelles. Léonie et Hortense.
Isa. Des jumelles ? Ça a dû être quelque chose, l’accouchement… Pas trop dur ?
Louis. Si très. Très dur. Heureusement, Anne-Sophie a su me soutenir pour que je passe ce cap difficile en douceur. Je croyais que tu n’étais plus dans la région ?
Isa. Je suis revenue il y a peu. Tu vois, je fais le tour des popotes.
Louis. Je suis une popote ?
Isa. La dernière : j’ai gardé le meilleur pour la fin. L’autre jour, je suis passée chez Flo. Il n’avait pas l’air spécialement content de me voir.
Louis. Oh que je le comprends !
Isa. Merci pour moi !
Louis. Parfois, quand notre vie n’est pas reluisante, on n’a pas envie de l’exposer à quelqu’un qui revient du passé. C’est peut-être le cas de Flo.
Isa. Peut-être…
Louis. Faut dire que son café… comment il s’appelle, déjà ?
Isa. Euh… L’Improbable.
Louis. L’improbable, c’est ça… ça lui va bien…
Isa. À Flo ?
Louis. Au café ! Quel bouge…
Isa. C’est un peu ce que je me suis dit, c’est vrai.
Louis. Et tu visites toujours tes popotes à cette heure-ci ?
Isa. J’ai pensé que tu devais être chez toi. Quand j’ai vu la lumière, je n’ai pas hésité. C’était ouvert.
Louis. Ouvert ?
Isa. Pas la porte principale, celle de la cuisine.
Louis. Mong !
Isa. Mong ?
Louis. Notre bo… notre employée de maison. À chaque fois, elle oublie de fermer la porte… (À part .) Elle va m’entendre, celle-là… (Haut .) Ça t’arrive souvent d’entrer chez les gens comme ça ?
Isa. J’avais très envie de te voir…
Louis. Je peux t’offrir quelque chose ?
Isa. Je ne veux pas m’imposer.
Louis, ironique. Non, bien sûr. C’est pour ça que tu rentres par-derrière quand la porte principale est fermée. C’est parce que tu ne veux pas t’imposer. Anne-So et les filles ne seront pas là avant une bonne heure : ça nous laisse un peu de temps.
Isa. Ça t’emmerderait qu’elle me trouve ici, hein ?
Louis. Tu la connais. Elle s’imaginerait tout de suite des choses…
Isa. Toujours aussi jalouse ? Ne t’inquiète pas, je serai partie avant son retour.
Louis. Je te sers une chartreuse ?
Isa. Tu as une bonne mémoire…
Louis. Assieds-toi.
Isa s’assied dans le fauteuil pendant que Louis sort un tabouret pliant de derrière le fauteuil. Puis il lui sert un verre.
Isa. Je peux prendre un tabouret aussi.
Louis, lui faisant un signe négatif. Anne-So se couche tôt. Moi, j’aime bouquiner. Pourquoi acheter deux fauteuils ?
Isa. Je reconnais là ton sens pratique.
Louis, lui tendant son verre, sans grand enthousiasme. Bon bah… À nos retrouvailles ?
Isa, tendant également son verre, l’œil pétillant. À nos retrouvailles !
Ils trinquent.
Louis. Qu’est-ce que tu deviens ?
Isa. Je bricole.
Louis. Tu habites Villiers ?
Isa. Oui. On va sûrement se croiser de temps en temps : c’est une petite ville.
Louis, se réjouissant faussement. Hin !
Isa, s’amusant. Génial, hein ? J’étais sûre que ça te ferait plaisir.
Louis, continuant à feindre – mal – la joie. Mais oui, quelle bonne nouvelle…
Isa. D’ailleurs si tu veux passer nous voir… Tu connais le chemin.
Louis. Je connais ?
Isa. Je n’ai pas changé d’adresse.
Louis. Aux Fougères ?
Isa. Oui.
Louis. Quelles nouvelles de ta mère ?
Isa. Toujours petite fonctionnaire des impôts. La retraite l’année prochaine.
Louis. Tu lui diras que je ne la félicite pas.
Isa. Pourquoi ?
Louis. On a beaucoup taxé ces derniers temps. Et qui trinque, encore une fois ? Les hauts revenus ! Ce n’est pas comme ça qu’on va leur donner envie d’investir…
Isa, sortant un papier. Justement, à ce sujet : tu gagnes plus de 40 000 par an ?
Louis. Moi ? Jamais de la vie ! Tu es folle ? Je suis simple chef d’établissement scolaire… qu’est-ce que tu t’imagines ?
Isa. Ah dommage… Parce que ceux qui gagnent plus de 40 000 par an vont avoir une réduction drastique de leur taxe foncière.
Louis, lui prenant le papier des mains. Donne-moi ça ! Bien sûr que je gagne plus de 40 000 par an… Tu remercieras ta mère.
Isa. J’habite chez elle.
Louis, surpris. Ah.
Isa. C’est temporaire. Le temps de trouver un local pour mon salon.
Louis. Ton salon ?
Isa. Je suis masseuse.
Louis, horrifié. Masseuse ?
Isa. Oui. (Allusive .) D’ailleurs si tu as besoin d’un moment de détente… Appelle-moi… (Elle lui laisse une carte.)
Louis, prenant la carte. Isa massage ?
Isa, gentille. Je te ferai un prix.
Louis, rangeant la carte. Merci, j’y penserais… Tu as quelqu’un en ce moment ?
Isa. Personne. Mais je me suis fait une raison.
Louis, essayant d’être gentil. Chaque pot a son couvercle.
Isa. Je suis comme une bagnole des années 1980. Vieille. Pas assez pour être une pièce de collection, mais suffisamment pour plus être cotée à l’argus.
Louis, idem. C’est dans les vieux pots qu’on fait les meilleures soupes.
Isa. Sauf quand le pot est resté trop longtemps sur le feu.
Louis, idem. Il n’est métal si dur que le feu n’amollisse.
Isa. Ça va peut-être aller, les proverbes chinois ? (Regardant la maison.) Ça marche bien pour toi.
Louis, faussement modeste. On fait aller.
Isa, montrant la maison. On fait plus qu’aller.
Louis. Je suis directeur de Sainte-Blandine.
Isa. Je sais. T’as suivi le chemin de Yves. Lui aussi, il est directeur d’établissement catho, non ? Notre-Dame des Victoires, c’est ça ?
Louis, dont le visage se rembrunit. Oui…
Isa. C’est plus coté que Sainte-Blandine…
Louis, agacé. Bof, tu sais, c’est très surfait…
Isa. Tu dois en connaître, du beau monde. Hein ? Le président du conseil régional ? Le préfet ? Allez, fais-moi rêver !
Louis. Oh non, je n’aime pas du tout jouer à celui qui a des relations, juste pour épater la galerie. J’en parlais encore hier soir, en buvant un scotch avec le ministre.
Isa. Le ministre ? Le ministre de l’éducation ?
Louis, confidentiel. Changeons de sujet…
Isa. Toi, directeur de Sainte-Blandine… au début, je ne voulais pas y croire…
Louis, se crispant. Ah oui ?
Isa. Quand on y était, on disait assez de conneries sur les curés.
Louis, les mains jointes, au Ciel. Pardonnez-la, mon Dieu.
Isa. Je rêve ou tu viens de parler à Dieu ? Wouah… ça va plus loin que je pensais… Moi, Dieu, la Vierge, Jésus, (Elle prononce « Jésusse ».) j’ai jamais pu…
Louis, après un bref silence. Pardon ?
Isa. Je dis, j’ai jamais pu…
Louis. T’as jamais pu quoi ?
Isa. Toutes ces bondieuseries.
Louis, voulant la faire répéter. Dieu, la Vierge et ? …
Isa. Et Jésusse.
Louis, après un nouveau silence. Jésusse ?
Isa. Ouais, Jésusse.
Louis, sans comprendre. Jésusse, euh… ?
Isa. Jésusse Christ !
Louis. Ah Jésus ! Jésusse… (La corrigeant .) Jé-sus !
Isa. Oui oh, tu sais, hein, je suis pas pratiquante…
Louis. Il ne s’agit pas d’être pratiquante, il s’agit d’avoir un minimum de culture générale…
Isa. C’est bien une réflexion de catho, ça.
Louis. Écoute, si t’es venue pour me titiller sur la religion…
Isa. Mais non, c’est bon… Simplement, je suis surprise. Mets-toi à ma place : je parle bien au gars qui était élève de terminale à Sainte-Blandine et qui, en cours de caté, a dessiné une moustache à la Vierge Marie ?
Louis. Moi ? Jamais !
Isa. Je m’en souviens parfaitement.
Louis. Pas du tout.
Isa. Je te dis que si !
Louis. Et moi je te dis que non ! Je n’ai jamais dessiné des moustaches à la Vierge. J’ai mis du rouge à lèvres sur son nez…
Isa. Ah oui c’est vrai ! ça lui faisait une belle tronche de pochtronne !
Louis, les mains jointes, au Ciel. Marie, Sainte Mère de Dieu, Pardonnez-lui, elle ne sait pas ce qu’elle…
Isa. Quand je pense à Bardet, notre dirlo…
Louis. C’était pas Bardet mais Barbey.
Isa. Oui, Barbey… ce que tu lui en as fait baver… (Le regardant, incrédule .) Toi ? Tu es devenu 100% catholique ? Et tu vas à la messe tous les dimanches ?
Louis. Oui.
Isa. Pas possible…
Louis. La messe, on en fait toute une histoire, mais finalement, qu’est-ce que c’est ? Un moment pour être avec le Christ. Tu bois du vin, son sang et tu manges une hostie, son corps.
Isa. C’est comme un apéro avec un pote. Sauf que là, tu bouffes ton pote.
Louis. Ta mère n’est pas croyante du tout ?
Isa. Pas du tout.
Louis. Pourquoi elle t’avait inscrite à Sainte-Blandine ?
Isa. Parce qu’elle pensait que c’était mieux que le public ! Mon père, par contre, était très pratiquant.
Louis. Ah oui ?
Isa. Il priait beaucoup, surtout la nuit.
Louis. Tiens ?
Isa. Saint-Julien, Saint-Estèphe, Saint-Émilion…
Louis. Moque-toi…
Isa, n’en revenant pas. Louis, à la messe, tous les dimanches…
Louis. Que veux-tu ? J’ai eu une illumination.
Isa, rigolarde. Toi ? Une illumination ? Quand ? En voyant le portefeuille du père d’Anne-Sophie ?
Louis, se levant. Je ne tolèrerai pas que tu remettes en cause ma foi. Et si la conversation continue sur ce ton, je me verrai dans l’obligation de…
Isa. T’en avais marre de Sainte-Blandine. Cet entre-soi, cet élitisme, ça te débèquetait…
Louis. Tu exagères…
Isa. Oh non !
Louis. Oh si ! Mais c’est vrai que ça me pesait… Et puis… je me suis rendu compte par la suite que… je maîtrisais les codes. Les bons, je veux dire. Ceux qui font réussir.
Isa. Les bons codes ?
Louis. Les bons codes, oui. La bonne façon de s’habiller, de parler, d’agir… (Se reprenant .) La bonne façon… (Trouvant ce qu’il veut dire .) La façon qui ouvre toutes les portes. Et ça, je le devais à Sainte-Blandine. Alors j’ai eu envie de rendre ce que j’avais reçu.
Isa. Et de le proposer à la jeunesse d’aujourd’hui contre rétribution.
Louis. Pourquoi pas ? Une clef pour accéder aux étages les plus élevés de l’ascenseur social, ça a de la valeur. Quand on vient de Sainte-Blandine, pour la suite, ça aide…
Isa. Et ceux qui rentrent pas dans le moule, on les vire ?
Louis, inquiet. Je ne vois pas où tu veux en venir.
Isa, retenant les chiens. Ah tu vois pas où je veux en venir ?
Louis, de plus en plus inquiet. Non…
Isa. Je suis la mère de Raphaël.
Louis, après temps. Comment ?
Isa. Vous venez bien d’exclure définitivement un élève en conseil de discipline ?
Louis. Euh… oui…
Isa. Un élève qui se prénomme Raphaël ?
Louis. C’est exact…
Isa. Je suis sa mère.
Louis. Qu’est-ce que tu racontes ?
Isa. La vérité.
Louis. Mais… mais je ne me souviens pas avoir eu connaissance de… ce n’est pas toi qui as inscrit Raphaël ?
Isa. C’est ma mère qui est venue avec lui. Elle y tenait. Mais Raphaël est mon fils. Raphaël Carouge, notre nom de famille.
Louis. Raphaël Carouge… Carouge comme toi ! Oh putain…
Isa. Comme tu dis…
Louis. Je comprends mieux pourquoi tu débarques à cette heure-ci…
Isa. L’heure idéale pour discuter de Raphaël.
***
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