Comédie policière pour 8, distribution modulable
Et si votre boîte aux lettres était envahie de messages anonymes haineux ?
Accordez-nous moins d’une heure et demie de lecture et plongez votre public dans une comédie policière captivante où les apparences sont trompeuses (même si vous avez des débutants dans la troupe).
Lancez votre public dans une enquête !
Avant de vous en dire plus, on a 3 questions rapides à vous poser :
🆘 Vous en avez assez des pièces sans rebondissements ni tension dramatique ?
🆘 Vous fuyez des intrigues policières qui tournent le dos aux problématiques d’aujourd’hui ?
🆘 Vous n’avez pas envie d’une enquête dont l’humour serait absent ?
Si vous avez répondu oui à au moins deux questions, alors lisez vite ce qui suit !
Voici le résumé d’Un Ravissant Petit Village :
Simone Desforges, commissaire en retraite, arrive à Nanteuil-lès-champs pour quelques jours de repos. Mais l’apparente tranquillité du village est troublée par une série de lettres anonymes révélant des secrets bien gardés. Poussée malgré elle à reprendre du service, Simone devra percer le mystère du corbeau tout en naviguant dans un univers où chacun semble avoir quelque chose à cacher. Entre scènes décalées, révélations et tensions, cette enquête captivante conduira à un dénouement aussi inattendu que satisfaisant.
En accédant au texte intégral d’Un Ravissant Petit Village, vous obtiendrez un fichier PDF de 116 pages environ pour un poids ultra-réduit de 941 Ko maximum, téléchargeable sur votre ordinateur, votre tablette, votre téléphone, et imprimable sur n’importe quel support. La mise en page vous permettra de noter sur le texte toutes les indications et notes de régie que vous jugerez utiles.
Avec Un Ravissant Petit Village, vous découvrirez :
✅ Une comédie policière palpitante : la pièce alterne enquête et scènes plus légères, proposant au public des registres variés qui maintiennent son attention
✅ Des personnages variés et hauts en couleur qui donneront à vos interprètes des situations intéressantes à jouer
✅ Un décor simple mais immersif : le salon d’un gîte rustique, facile à monter et à faire tourner.
✅ Une intrigue riche en mystères : le public sera tenu en haleine par cette enquête où les apparences sont trompeuses.
✅ Une critique sociale subtile : des thèmes intemporels comme les tensions de voisinage, les secrets familiaux et la haine de l’autre parleront à votre public.
La pièce a été montée avec succès par plusieurs troupes, séduisant les spectateurs par son mélange d’humour, de suspense et de tension dramatique :
🎭 La Compagnie de Théâtre Amateur de Moret, Seine-et-Marne, 2020
🎭 Le Groupe Artistique de Marly-le-Roi, Yvelines, 2023.
Intéressé(e) ? Téléchargez gratuitement le texte intégral d’ Un Ravissant Petit Village
et laissez votre public explorer les secrets et mystères de ce village pas si paisible que cela.
Attention : déconseillé aux Compagnies qui cherchent à tout prix à ne pas évoquer des réalités difficiles avec leur public.
Vous souhaitez présenter Un Ravissant Petit Village au public ?
Une autorisation de représentation est nécessaire :
👉 Faire la demande d’autorisation sur le site de la SACD
La pièce a été créée en 2020 par le Compagnie de Théâtre Amateur de Moret (alors Groupe Artistique de Moret), Seine-et-Marne.

Une autre production de la pièce a été proposée par les Baladins de Marly, Yvelines, en 2023.

Questions fréquentes sur Un Ravissant Petit Village
Quel est le ton de cette comédie policière ?
C’est une enquête pleine d’humour, où la recherche de vérité flirte avec la satire sociale.
Le suspense monte, les répliques fusent, et les rires désamorcent la tension juste au bon moment
Combien de personnages et quel décor prévoir ?
Une belle galerie de suspects : voisins, notables, faux amis, commères bavardes et un commissaire en retraite forment une distribution de 8 personnages.
Le tout dans un seul décor — un salon rustique — simple à monter, mais parfait pour faire naître la tension.
Quel public appréciera cette pièce ?
Tous ceux qui aiment les intrigues à secrets, les personnages hauts en couleur et les faux-semblants.
La pièce séduit autant les amateurs d’humour que les passionnés de mystères.
Pourquoi cette pièce plaît-elle aux troupes ?
Parce qu’elle allie enquête, comédie et critique sociale sans jamais se prendre au sérieux.
Et qu’elle permet à chaque comédien de briller dans un rôle fort – même les seconds couteaux ont leurs moments de gloire.
Extrait d’Un Ravissant Petit Village
Personnages
Desforges, commissaire en retraite.
Bertheau, propriétaire de gîte.
Marie, bonne à tout faire, très jeune.
Eichberg, compositeur de musique.
Andry, pharmacien.
Anita, sa mère, retraitée.
Montvallon, patronne du Grand Veneur.
Claire, sa fille, étudiante.
Le décor
L’action se déroule dans le salon du gîte que tient Bertheau. Au fond, une ouverture vers un couloir desservant les autres pièces de l’habitation. C’est une maison de village ancienne, rustique mais confortable. Une table, deux chaises, un canapé, une table basse, des revues, une desserte où quelques bouteilles sont rangées, un buffet.
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Acte I
Tableau 1.
Scène 1. Desforges, Bertheau, puis Marie.
Desforges est assise sur le canapé et fait des mots-croisés. Bertheau, quant à elle, fait l’inventaire de ses bouteilles d’alcool sur la desserte.
Bertheau. Et comment avez-vous eu l’idée de venir dans notre ravissant petit village ?
Desforges. Internet.
Bertheau. Nanteuil est sur internet ? Nanteuil-lès-champs ?
Desforges. Nanteuil-lès-champs. À condition de taper les bons mots clefs.
Bertheau. Ah oui ? Lesquels ?
Desforges, pince-sans-rire. Trou à rat.
Bertheau, pensant avoir mal entendu. Je vous demande pardon ?
Desforges, toujours pince-sans-rire. C’est de l’humour.
Bertheau, souriant par politesse. De l’humour de la ville, sans doute… Je ne sais pas s’il sera très apprécié ici. Et pourtant, Dieu sait si j’aime les blagues ! Tenez connaissez-vous celle-ci : « une vache va voir sa copine et lui dit : ‘ça te fait pas peur, toi, ces histoires de vache folle ? – Je ne sais pas, lui répond l’autre, je suis un lapin !’ ». (Elle rit, mais pas Desforges. Aussi, Bertheau entreprend de lui expliquer.) En fait, elle pensait parler à une vache, mais c’était un lapin ! … (Desforges reste muette. Changeant de sujet et appelant.) Marie !
Desforges. Excusez-moi : je repensais à votre question. Vous vous demandiez pourquoi je suis venue ici ? Chez soi, on tourne parfois en rond. Avec des idées noires dans la tête. J’avais besoin de changer d’air.
Bertheau. Vous allez être servie. Ici l’air est pur comme nulle part ailleurs.
Desforges. En tout cas, bravo pour votre gîte. Il est très agréable.
Marie entre, tablier de ménage et plumeau.
Marie, à Bertheau. Vous m’avez appelée ?
Bertheau. Je ne trouve pas le porto.
Marie. Dans le buffet.
Bertheau. Ouvre-le, s’il te plaît, je ne sais plus où j’ai mis mes clefs.
Marie, saluant Desforges. Madame.
Desforges, rendant le salut. Jeune fille. (A la vue du grand trousseau de clefs que Marie sort après avoir posé son plumeau.) Eh ben ! (À Marie.) Tu gardes les clefs de tout le village ?
Marie, qui a choisi une clef et répond à Desforges. Presque !
Desforges, à Bertheau, alors que Marie ouvre le buffet, sort le porto, deux verres, fait le service et sort. Y a toujours du brouillard comme ça ?
Bertheau. En septembre, toujours un peu, surtout le matin.
Desforges. En tout cas, bravo. J’ai trouvé qu’il y avait dans votre village une belle… une belle harmonie. Tous ces volets bleu marine… c’est impressionnant… c’est vrai, quelqu’un aurait pu peindre les siens en rouge ou en vert, mais non ! Bleu marine, exclusivement.
Bertheau. Nous essayons de nous mettre d’accord pour que personne ne dénote… C’est tout de même plus agréable. Les affaires courantes sont réglées par la mairie centrale de Grandville, mais elle est à quatre kilomètres ! Alors nous avons mis sur pied une association de voisinage, Vigilance Nanteuil. Nous y discutons de tout et cela nous permet de maintenir de bonnes relations.
Desforges. Il y a des choses à voir, dans le coin ?
Bertheau, saisissant un livret et le présentant à Desforges. J’ai justement fait un petit guide à l’intention de mes locataires saisonniers.
Desforges, sentant avec plaisir le livret. Hum ! Quel parfum… Et sinon ? Dans le village ?
Bertheau. Il y a la rue Grande et ses commerces. Malheureusement, ils sont de moins en moins nombreux… Ces dernières années, le village a perdu beaucoup de Nanteuillais.
Desforges, tendant l’oreille. D’où ce calme… ce silence…
Bertheau. Un peu plus bas, au bord du Loing, il y a l’allée du Temps perdu, qui passe en-dessous du viaduc. En face, sur le vallon, vous pourrez vous promener sur le Bois-Corbin. Quoique…
Desforges. Quoique ?
Bertheau. Oubliez le Bois-Corbin : la chasse vient d’ouvrir.
Desforges. C’est bien ce que je pensais.
Bertheau. Ce que vous pensiez ?
Desforges, avec un contentement sincère. Je sens qu’ici je vais vraiment me barber !
Bertheau. Oh !
Desforges. Ne vous en faites pas : je suis là pour ça ! (Sortant un petit livre.) Me barber et n’avoir rien d’autre à faire que mes mots-croisés. Et, ainsi, peut-être, me vider la tête. (Consultant une grille, à Bertheau.) « Oiseau de malheur », en sept lettres ? (Son téléphone sonne. À part.) Tiens, on capte, ici ? (Décrochant.) Allô, Henri ? (Un temps.) Je prends quelques jours de repos. (Un temps.) Dans un trou à r… (Rectifiant.) Dans un ravissant petit village… (Un temps.) Ah ? (Un temps.) C’est sérieux… (Un temps.) Ah non, Henri, je regrette, mais je ne bouge pas. (Un temps.) Eh ben trouve quelqu’un d’autre. Je suis sûre qu’il y a de nombreux collègues qui accepteront de t’aider. (Un temps.) Tu parles ! Je suis partie justement parce que j’étais plus bonne à rien. (Un temps.) Me passe pas de pommade, ça sert à rien. D’autant que maintenant, j’ai pas enquêté depuis… pfff… quinze ans ! (Un temps, peu convaincue.) Comme le vélo, comme le vélo… j’en suis pas sûre… (Un temps, gentiment grondeuse.) Allez, perds pas ton temps avec une vieille peau comme moi, et retourne bosser, feignant ! (Elle raccroche.)
Bertheau, curieuse. Un problème ?
Desforges. Un ancien collègue… Il voulait que je vienne lui donner un coup de main. Une sombre histoire de meurtre. Encore une…
Bertheau. Vous êtes dans la police ?
Desforges. J’étais. Commissaire Desforges. Mais je me suis rangée des voitures. (Soudain, elle remarque un livre. Lisant.) « Agatha Christie, La Plume empoisonnée. » C’est à vous ?
Bertheau. C’est un livre de Marie.
Scène 2. Eichberg, Desforges, Bertheau.
Eichberg. Salut la compagnie ! (Voyant Desforges qui se lève, à Bertheau.) Ach ! Rose, je ne savais pas que vous aviez une nouvelle locataire ! (À Desforges, se présentant.) Johann Kristof Eichberg.
Desforges. Simone Desforges.
Eichberg. Je suis un peu le fou du village, il en faut toujours un. Je serai ravi de vous accueillir chez moi pour un petit schnaps. J’habite un vieux manoir dans la partie nord de Nanteuil.
Desforges. Je crois que je suis passée devant en me promenant ce matin. J’ai entendu un piano.
Eichberg. En ce moment, je travaille un concerto qui me donne du fil à retordre.
Desforges. Monsieur est pianiste ?
Eichberg. Compositeur. Comment avez-vous eu l’idée baroque de venir vous enterrer à Nanteuil-lès-champs ?
Bertheau. Johann Kristof, vous n’allez pas recommencer…
Eichberg. Un concentré de paysans, tous plus limités les uns que les autres…
Bertheau, avec réprobation. Johann Kristof…
Eichberg. Mais si vous souhaitez faire une étude ethnographique sur le crétinisme rural, vous aurez ici une matière inépuisable.
Bertheau, à Desforges, tentant de sourire. Il plaisante…
Eichberg, tendant le courrier à Bertheau. C’était sur le paillasson.
Bertheau, désignant le journal, à Desforges. L’Écho du Bocage, nouvelles locales. Je dois être une des plus anciennes abonnées. (Regardant une enveloppe dont l’adresse a été écrite avec des lettres découpées.) Tiens… (Elle déchire l’enveloppe, lit et, choquée.) Oh !
Eichberg, lisant avec un petit sourire. « Sale droguée. Ta nouvelle locataire sait-elle que tu prends de la cocaïne ? » Charmant…
Bertheau, sous le choc. C’est… c’est… c’est immonde !
Eichberg, ne pouvant s’empêcher de sourire. Calmez-vous, ma chère…
Bertheau, à Desforges. Commissaire, pourriez-vous…
Desforges, la coupant. Je ne suis plus commissaire.
Bertheau. Vous seule pouvez enquêter pour découvrir l’auteur de ce torchon.
Desforges. Ah non ! Je suis à la retraite et qui plus est, en vacances !
Elle sort.
Bertheau. Elle n’a même pas fini son porto.
***
Tableau 2.
Scène 1. Desforges, Bertheau, puis Andry, puis Eichberg.
Bertheau. Je vous demande la discrétion la plus absolue, commissaire.
Desforges, grignotant. Arrêtez de me donner ce titre, je ne suis plus commissaire. Je suis une simple retraitée.
Bertheau. Hier, cette lettre m’a mise sous le choc, mais aujourd’hui je me suis rétablie, et je ne voudrais pas que quelqu’un…
Desforges. Écoutez, la lettre que vous avez reçue, je m’en fiche comme de ma première chemise ! (Proposant une part à Bertheau.) Tenez, votre boulangère fait un délicieux cake aux fruits…
Entre Andry, un dossier sous le bras, nerveux.
Andry, coupant Desforges. Bonjour commissaire.
Desforges, contrariée. Vous aussi ? Je ne suis pas commissaire !
Andry. C’est comme ça que tout le village vous appelle.
Desforges, surprise. Tout le village ? Mais… Et d’abord… je ne pense pas vous connaître…
Andry. Excusez-moi. (Se présentant.) Théodore Andry, pharmacien et trésorier adjoint du Cercle de chasse. (Revenant à ses moutons.) Voilà, commissaire…
Desforges, excédée. Ne m’appelez pas comme ça…
Andry. Comme vous le savez, hier plusieurs Nanteuillais ont reçu des lettres anonymes.
Desforges. Plusieurs ? Vous voulez dire : d’autres en plus de Mme Bertheau ?
Bertheau, bas, à Desforges. Mais enfin ! Je vous avais dit de…
Andry. Vous en avez reçu ?
Johann Kristof entre, radieux.
Eichberg. Salut, bande de ploucs ! Mon petit doigt m’a dit que le facteur avait eu beaucoup de travail, ce matin…
Andry, bas, à Desforges. Nous reparlerons de tout ça plus tard…
Eichberg. Tiens, Théodore ! Avez-vous enfin trouvé l’âme sœur ? (À Desforges.) Il cherche, le pauvre garçon, il cherche mais il ne trouve pas… Il faut dire qu’avec sa maman chérie, ce n’est pas simple…
Andry, remettant une enveloppe à Desforges. Permettez-moi de vous inviter à notre banquet annuel d’ouverture de la chasse. (Faisant de l’humour.) Et ce n’est pas une lettre anonyme ! (À Bertheau.) Attention, vous avez déjà sorti votre poubelle…
Bertheau. Zut !
Bertheau sort vivement.
Desforges. Que se passe-t-il ?
Andry. Une question d’hygiène… Vous restez pour notre réunion ?
Desforges. Votre réunion ?
Andry. La réunion de notre association de voisinage, Vigilance Nanteuil.
Eichberg, acide. Ah ! Cette association… On devrait la rebaptiser Le Club des vieilles chouettes.
Andry. Je vous en prie !
Eichberg. Ma suggestion n’est peut-être pas très adéquate, j’en conviens. On y trouve aussi quelques faisans.
Andry, regardant l’heure sur sa montre. Quoi qu’il en soit, c’est bientôt l’heure.
Desforges. Jolie montre.
Andry, avec fierté. Une Vortex.
Scène 2. Anita, Bertheau, Desforges, Andry, Eichberg.
Bertheau, entrant avec Anita, vêtue de manière colorée, qui tient dans ses mains une écharpe. Je vous assure que je ne l’avais pas sortie, je faisais juste un peu de rangement dans le cellier lorsque vous…
Anita, la coupant, à Desforges. Vous êtes le commissaire Desforges ?
Desforges. Je ne suis pas commissaire ! Ou plutôt je ne le suis plus.
Anita, à Andry. Tu es déjà là, mon grand ?
Andry, à Desforges. Je vous présente ma mère, commissaire. (Cette apostrophe contrarie Desforges.)
Anita, à Desforges, confidentielle, parlant d’Andry. Il est beau, n’est-ce pas ? Hélas, il n’a pas encore trouvé chaussure à son pied…
Andry, bouillant intérieurement, bas, à Anita. Maman…
Anita, à Desforges. Que voulez-vous ? Il n’est pas comme tout le monde. Ça peut effrayer…
Andry, se retenant d’exploser, bas, à Anita. Maman, s’il te plaît…
Anita, à Desforges. Je lui dis : « Théodore, sois un peu plus normal ! » Mais rien n’y fait… Toujours affairé à ses histoires de chasse…
Andry, rongeant son frein, bas, à Anita. Maman, arrête…
Anita, à Desforges. D’ailleurs il a toujours été original. Figurez-vous qu’il a fait pipi au lit jusqu’à dix-sept ans !
Andry, éclatant. Assez !
Anita, à Desforges, après un silence durant lequel tout le monde s’est montré gêné par l’éclat de Théodore. —À propos, ça me ferait plaisir que vous veniez prendre le thé chez moi. J’habite à deux pas de chez mon fils. 15 chemin des Prés.
Desforges. Chemin des blés ?
Anita, sortant une feuille de papier et un stylo. Des Prés. Je vais vous l’écrire. (Écrivant.) 15 chemin des Prés. Et voilà ! (Elle donne la feuille à Desforges. À Andry, lui tendant l’écharpe.) Je t’avais dit de mettre ton cache-nez !
Andry, gêné par cette remarque. Je n’en ai pas besoin, merci…
Anita, lui mettant autoritairement l’écharpe. Taratata ! Le temps a fraîchi. D’ailleurs, ce matin, tu as oublié de prendre ton suppositoire. Tiens ! (Elle joint le geste à la parole.)
Andry, bas. Pas devant tout le monde…
Anita. Au fait, je t’ai vu conter fleurette à la petite Fanny. Enlève-toi cette fille de la tête, elle n’est pas pour toi…
Andry, à part. J’en peux plus…
Bertheau, doucement perfide, à Anita. Au fait, ma chère, il m’a semblé voir un peu de laisser-aller sur votre pelouse…
Anita. Michel était en congé, alors il n’a pas pu… (Prenant soudain conscience de quelque chose.) Oh mon dieu ! Je dois dépasser, maintenant…
Scène 3. Les mêmes, Montvallon.
Montvallon, entrant triomphalement des dossiers sous le bras et une revue à la main. Ça y est, je l’ai !
Bertheau. Qu’avez-vous ?
Montvallon, lui donnant le journal. Un article sur le restaurant ! Dans mon journal professionnel !
Bertheau, lisant le titre du magazine. La Restauration ?
Montvallon, avec fierté. La Restauration… (Voyant soudain Desforges.) Vous êtes le commissaire Desforges ?
Desforges, se retenant d’exploser. Une bonne fois pour toutes, je ne suis plus commissaire, je suis en retraite depuis fort…
Montvallon, lui tendant la main. Laurène Montvallon, patronne du Grand Veneur, le restaurant qui est dans la rue Grande.
Desforges. Spécialités de grillades au feu de bois ?
Montvallon. C’est ça ! Vous restez pour notre réunion ?
Desforges. Non.
Montvallon, avec intention. Je comprends… Vous allez enquêter ?
Desforges. Enquêter ?
Montvallon. Cette histoire de lettres anonymes…
Desforges, sèche. Non madame, je ne vais pas enquêter. Je vais prendre l’air car je suis retraitée de la police et qui plus est, en vacances !
Elle sort.
Montvallon. Bizarre… M. Eichberg, vous n’êtes pas membre de notre association, aussi je vous demanderai de…
Eichberg. Rassurez-vous, je vais vous laisser à vos… (Il imite un caquètement.) … discussions… Ne médisez pas trop. Le fiel, ça rend les dents jaunes.
Il sort.
Scène 4. Montvallon, Bertheau, Anita, Andry.
Montvallon. Nous allons pouvoir commencer… (Tous prennent place autour de la table.) Je déclare la réunion ouverte. Je relève l’absence de notre vice-présidente, Claire. (Un petit silence : Montvallon est contrariée.) Quelques remarques préliminaires. Rose, on m’a rapporté que vous avez sorti votre poubelle ce matin.
Bertheau. Je l’ai fait machinalement, mais je vous assure que…
Montvallon. Je vous rappelle qu’afin de préserver notre cadre de vie, les membres de Vigilance Nanteuil se sont engagés à sortir leurs poubelles seulement une heure avant le ramassage des ordures, soit à dix-sept heures. J’aimerais que vous respectiez les horaires avec plus de discipline.
Bertheau, soumise. Bien, présidente.
Montvallon, à Anita, qui rit sous cape de la déconvenue de Bertheau. Vous n’avez pas lieu de rire, Anita. Votre gazon fait exactement trois centimètres six de hauteur.
Anita. Quoi ? Ça m’étonnerait !
Montvallon. Inutile de contester, je viens d’aller le mesurer moi-même.
Anita. Je suis confuse. Michel est en vacances, alors il n’a pas pu faire…
Montvallon, sèche. Ne cherchez pas des excuses. Vous êtes coupable de négligence. Dois-je le redire ? Dans un souci de cohérence esthétique, et ce afin de donner l’exemple à l’ensemble du village, les gazons des membres de l’association ne doivent en aucun cas dépasser trois centimètres, taille de rigueur. Que je ne vous y reprenne plus.
Anita, soumise. Bien, présidente.
Montvallon, consultant ses dossiers. Nous allons maintenant nous prononcer sur une demande d’adhésion. M. Gorgetti, Antonio.
Bertheau. Gorgetti ? C’est italien, non ?
Montvallon, lisant. M. Gorgetti réside à Nanteuil depuis six mois.
Bertheau. Oh oui, sûrement un Italien… ça m’en rappelle une bonne : c’est un Italien, un Américain et un Belge qui sont envoyés sur la Lune. Alors l’Italien a emmené des spaghettis…
Montvallon, la coupant. Je vous en prie, Rose, ce n’est pas le moment…
Anita. Il parle français, ce Gorgetti ?
Montvallon. Six mois seulement à Nanteuil, ça me paraît un peu jeune. D’autant que ce monsieur ne maîtrise pas encore toutes nos coutumes, si j’en juge par son jardin… Je mets donc l’adhésion de M. Gorgetti aux voix. (Elle regarde les autres.)
Anita. Défavorable.
Andry. Défavorable.
Bertheau. Défavorable.
Montvallon. Défavorable. (Sans état d’âme.) Adhésion refusée. (À Andry.) Secrétaire, vous nous faites votre compte-rendu hebdomadaire ?
Andry. Bien, présidente. (Andry se lève, ouvre son dossier. Des papiers tombent, dont une enveloppe sur laquelle son adresse est écrite avec des lettres découpées. Un silence se fait. Tous regardent la lettre.)
Montvallon. Vous aussi, vous en avez reçu ?
Anita, se levant, prenant la lettre et l’ouvrant. Qu’est-ce qu’elle dit ?
Andry. Non, Maman…
Anita, lisant. « Quand tu vas chasser, tu préfères tirer les femmes plutôt que les sangliers, espèce de porc. » (Sous le choc, Anita s’effondre sur sa chaise.)
Andry, nerveux. C’est… ce sont des calomnies ! Une fois de plus…
Tous gardent un silence anxieux.
***
Tableau 3.
Scène 1. Andry, Bertheau, Anita, Montvallon, Marie, puis Desforges.
Tout le monde parle en même temps dans un brouhaha général. Marie sert des rafraîchissements.
Montvallon. Silence ! Qui demande la parole ? (Anita lève la main, Montvallon lui fait un signe.)
Anita, très nerveuse et vêtue de manière sombre. Ça fait trois jours que ça dure ! Tout le monde en reçoit… Tous les jours je vais au courrier et je me demande si je vais en trouver une. Tous les jours ! Ma vie est devenue un cauchemar…
Montvallon. Vous en avez reçu ?
Anita. Pas encore !
Andry. Ça ne saurait tarder…
Bertheau. C’est justement ça qui est insupportable ! Cette attente…
Marie. Les Moreau en ont reçu une hier.
Andry. Et voilà !
Anita. C’est une contagion !
Desforges paraît avec deux valises.
Desforges. Bonjour tout le monde. Mme Bertheau, c’est l’heure du départ. Je vais vous régler ma note.
Andry. Vous… ? Vous partez ?
Desforges. Je vais d’abord faire un dernier petit tour de Nanteuil et après, ciao la compagnie !
Anita, apeurée. Vous ne pouvez pas nous laisser comme ça, commissaire !
Desforges, à part. Quand ça rentre pas, ça rentre pas…
Bertheau. Oui commissaire, restez et aidez-nous à démasquer cet affreux corbeau !
Andry, à Desforges. Restez.
Marie, à Desforges. Oh oui, restez.
Montvallon, aux autres. Allons, n’ennuyez pas Mme Desforges. Tout ça va s’arrêter, et bientôt ce ne sera plus qu’un mauvais souvenir.
Desforges. Enfin une parole sensée ! Messieurs-Dames, je vous laisse quelques instants, histoire de prendre quelques clichés de votre ravissant petit village, et je reviens vous faire mes adieux.
Marie. Vous avez encore besoin de moi, Mme Bertheau ?
Bertheau. Non.
Marie. Alors, je peux accompagner Mme Desforges dans sa promenade ? (Se tournant vers Desforges.) Enfin, si vous permettez…
Desforges. Avec plaisir !
Anita. Eh bien, Marie ? Tu oublies un peu vite qu’aujourd’hui tu fais le ménage chez moi.
Andry, réprobateur. Maman… (À Marie.) Va faire un tour. Tu passeras chez ma mère après.
Marie. Merci M. Andry !
Desforges et Marie sortent.
Bertheau. Madame va tranquillement se promener… alors que le village est plongé dans l’angoisse ! C’est tout de même dommage… Quand on pense que la gendarmerie de Grandville se contrefiche de nous et qu’on a la chance d’avoir une commissaire dans nos murs, on pourrait profiter de ses compétences pour…
Montvallon, sèche. Mme Desforges nous a dit non. Je vous demande de respecter son choix. Pour l’heure, l’important est de se calmer et de garder le silence sur tout ceci. Si la nouvelle se répandait, ce serait fatal pour Nanteuil. Nous avons un ravissant petit village. Ne souillons pas son image.
Andry. Présidente, c’est impossible. Tout Nanteuil ne parle plus que de ça. J’ai même vu Charon, de L’Écho du Bocage. Je suis sûr qu’il veut faire un article.
Anita. Un article ? Mais la nouvelle va se savoir dans tout le pays !
Montvallon. Inutile d’être alarmiste. Laissez-moi réfléchir. (Un temps.) Nous allons rédiger un communiqué de presse. Enfin… je vais m’en charger. Je pense être la plus à même de trouver les mots justes. Je dirai que… il s’agit d’une mauvaise plaisanterie. Et que tout est déjà rentré dans l’ordre.
Scène 2. Claire, Andry, Bertheau, Anita, Montvallon.
Claire, entrant en courant. Ah ! Maman, tu es là !
Montvallon. Évidemment, je suis là.
Claire. Il faut absolument que je te dise, ce matin j’ai…
Montvallon, rude. Tu permets ? Nous sommes en réunion et la situation est grave.
Claire. Mais maman, il s’agit des…
Montvallon. Il n’y a pas de maman qui tienne. Je suis en train de rédiger un communiqué de presse pour Charon, au sujet des lettres anonymes.
Claire. Pas la peine.
Montvallon. Je te demande pardon ?
Claire. J’ai rencontré Charon sur la place du marché et je lui ai donné tous les détails.
Montvallon. Quoi ?
Claire. L’article paraîtra demain.
Montvallon. Qu’est-ce que tu lui as dit ?
Claire, déstabilisée. Eh bien je… je lui ai tout raconté et…
Montvallon. Espèce de petite idiote ! (Cet éclat jette un froid.) Maintenant, tous les charognards vont se ruer sur Nanteuil.
Claire. Mais je… j’ai été précise et… je n’ai donné que les faits et… tu verras… tu n’auras pas à te plaindre de moi…
Montvallon. Je n’aurai pas à me plaindre de toi ? Mais c’est mon occupation principale depuis que tu es née ! Tu veux m’expliquer que tu as su quoi dire à Charon ?… Laisse-moi rire…
Claire, les larmes aux yeux. Oui, c’est vrai, à la réflexion, j’aurais dû te laisser faire, je suis désolée…
Montvallon. Arrête de d’excuser. Je hais les excuses. Les excuses sont les béquilles des faibles. (Aux autres.) Vous pouvez féliciter Claire. À cause d’elle, Nanteuil sera désormais connu pour son corbeau.
Montvallon sort. Un silence, puis, Andry et Anita se lèvent.
Andry, mettant la main sur l’épaule de Claire. Elle prend cette histoire très à cœur… (Anita regarde la main d’Andry d’un air réprobateur. Il la retire.)
Anita. Il y a de quoi… L’atmosphère devient irrespirable !
Elle sort, suivie d’Andry.
Bertheau, près de Claire. Tout le monde est à cran en ce moment.
Scène 3. Desforges, Marie, Claire, Bertheau.
Desforges, entrant avec Marie et poursuivant la discussion. Et tu les as tous lus ? Tous les romans d’Agatha Christie ?
Marie. Tous !
Desforges. Je suis impressionnée.
Marie. Il faut bien que je m’intéresse au sujet, si je veux rentrer dans la police…
Desforges. Tu veux rentrer dans la police ?
Marie. Comme vous.
Desforges. Moi ? C’est de l’histoire ancienne…
Bertheau. Navrée d’interrompre cette intéressante conversation, mais… Marie, tu es attendue chez Mme Andry.
Marie, tendant la main à Desforges. J’ai été ravie de vous connaître, commissaire.
Desforges. Toi, je veux bien que tu m’appelles comme ça.
Marie sort.
Desforges, sortant des billets et les donnant à Bertheau. Mme Bertheau, merci pour tout.
Bertheau. Mme la commissaire, je vous en supplie. Vous voyez dans quelle détresse nous sommes. Y a t-il une chose qui pourrait vous convaincre de rester ?
Desforges. Rien, hélas, j’en ai peur.
Bertheau. Tant pis. J’espère que vous ne garderez pas de Nanteuil un trop mauvais souvenir ?
Desforges. Un mauvais souvenir ? Au contraire ! Quelle idée…
Bertheau. Bien. N’hésitez pas à revenir, si le cœur vous en dit. Me permettez-vous de vous laisser ? J’ai une course urgente.
Desforges. Je vous en prie.
Bertheau, tendant la main à Desforges. Au revoir.
Desforges, serrant la main à Bertheau. Au revoir.
Bertheau sort.
Scène 4. Claire, Desforges.
Desforges va à ses valises, qu’elle prend. Elle s’aperçoit soudain de la présence de Claire.
Desforges, saluant Claire. Au revoir.
Claire, d’une voix étranglée. Madame.
Desforges, sans bouger, observant Claire. Mais… vous pleurez ? (Claire garde le silence. Desforges pose ses valises et va à Claire. Elle sort un mouchoir et le présente à Claire.) Tenez.
Claire. Ce n’est rien…
Desforges. Je vous en prie…
Claire. Ça va passer…
Desforges, mettant la main sur son épaule. Allons, mademoiselle… (Claire fond en larmes. Douce.) Eh ben voilà… Faut que ça sorte… (Claire pleure en silence quelques secondes, puis s’arrête.) Vous voyez ? C’est sorti. (Elle lui présente de nouveau le mouchoir, que Claire prend.)
Claire. Merci.
Desforges. Voir pleurer une jeune fille, ça, je ne le supporte pas ! (Se présentant.) Simone Desforges.
Claire. Claire Montvallon.
Desforges. Montvallon… Montvallon du Grand Veneur ? Vous êtes la fille de Mme Montvallon, la patronne ? (Claire acquiesce.)Une femme de tête, votre mère.
Claire. Parfois, nous n’arrivons pas à nous comprendre. Quant à vous, je n’ai pas bien saisi. Vous êtes de la police ?
Desforges. Je l’ai été.
Claire. Je voulais en parler à ma mère, mais elle ne m’a pas laissé… Vous permettez ? (Claire sort une enveloppe dont l’adresse a été écrite en lettres découpées.)
Desforges. Vous aussi ?
Claire, lisant, après avoir ouvert la lettre. « Il te les faut tous dans ton lit ? Tu subiras la vindicte des épouses nanteuillaises quand je publierai ton tableau de chasse, sale nymphomane. » Comment peut-on écrire des choses pareilles ?
Desforges. La nature humaine est insondable.
Claire. Je sais ce que vous vous dites : pas de fumée sans feu. Mais tout est faux, je le jure !
Desforges. Je vous crois.
Claire. S’il met sa menace à exécution, s’il publie sa prétendue « liste », vous imaginez quelle sera ma réputation ? Que deviendra ma vie ici ? Aidez-moi. S’il vous plaît.
Scène 5. Les mêmes, Bertheau, Marie.
Bertheau, entrant avec Marie, terminant sa conversation. Tu as dû le laisser dans l’arrière-cuisine. (Apercevant les deux autres.) Tiens, Claire ! Et vous aussi, commissaire, vous êtes encore là ?
Desforges. Je m’en vais. Sinon je vais rater mon train.
Bertheau. Alors vous ne savez pas.
Desforges. Je ne sais pas quoi ?
Bertheau. Le trafic est interrompu jusqu’à demain. Un gros accident à Grandville.
Desforges. Quoi ?
Bertheau. Je crains que vous ne soyez contrainte de prolonger votre séjour chez nous…
Desforges. Zut !
Claire. En ce cas, vous voulez bien mener l’enquête ? (Desforges garde le silence.) Ça vous fera passer le temps…
Desforges, après une hésitation. Pourquoi pas… (Manifestation de contentement des autres.) Mais après-demain, vous vous débrouillerez sans moi !
Marie, empressée. Je remonte vos valises dans votre chambre !
Desforges. Non, petite. J’ai une mission pour toi.
Bertheau. En ce cas, c’est moi qui m’en charge ! (Elle disparaît avec les valises.)
Desforges, à Marie. Va dans Nanteuil, sonne chez les gens et demande leurs lettres anonymes. Je veux en lire le plus possible.
Marie. Bien, commissaire !
Desforges, à part. Faut que je m’y fasse. Pour tout le monde ici, je suis le commissaire Desforges. (À Marie.) Dis-donc, toi, avant de partir, sers-moi donc un porto.
Marie. Avec plaisir, commissaire !
***
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