Les Enfants de la tempête

Drame amoureux pour 1F/2H

Jusqu’où peut-on aller pour sauver un château et son âme ?

Accordez-nous moins d’une heure et demie de lecture et plongez votre public dans un drame captivant où héritage, amour et idéaux s’entrechoquent (même si vous avez peu de moyens).


Fantômes du passé…


Avant de vous en dire plus, on a 3 questions rapides à vous poser :

🆘 Vous en avez assez des comédies ?
🆘 Vous ne voulez pas d’une pièce qui se déroule aujourd’hui ?
🆘 Vous n’aimez pas les pièces qui se replient sur la sphère personnelle ?

Si vous avez répondu oui à au moins deux questions, alors lisez vite ce qui suit !


Résumé :

Thibault, aristocrate déchu, tente de redonner vie au château de Bois-le-Vicomte, dernier vestige de sa famille. Lorsque Louise, une journaliste républicaine, échappe à une inondation et trouve refuge chez lui, les opposés s’attirent et s’affrontent. Entre dialogues acérés, quiproquos et révélations, la pièce explore les tensions entre tradition et modernité, amour et convictions, dans un décor où les fantômes du passé ne sont jamais loin.


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Avec « Les Enfants de la Tempête », vous découvrirez :

✅ Une intrigue riche en rebondissements : des tensions qui tiennent le spectateur en haleine jusqu’au dénouement.
✅ Des personnages complexes et attachants : un trio (1F/2H) parfait pour des interprétations nuancées.
✅ Un décor évocateur : un château chargé d’histoire, facilement réalisable sur scène.
✅ Une réflexion intemporelle : un texte qui interroge la mémoire, l’héritage et les choix qui façonnent nos vies.
✅ Un mélange de drame et d’épouvante : une pièce proposant des scènes émouvantes, tendues, voire effrayantes.


Intéressé(e) ? 

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et laissez votre public explorer les passions, les conflits et la beauté d’un drame romantique et historique.

Attention : déconseillé aux Compagnies qui préfèrent les pièces légères !


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Questions fréquentes sur Les Enfants de la Tempête

Est-ce une pièce dramatique ou romantique ?

Les Enfants de la Tempête entremêle la tension d’un drame et la puissance d’un amour contrarié. Le romantisme y sert de révélateur moral plutôt que de refuge sentimental.

La pièce est-elle difficile à monter pour une troupe amateure ?

Non. Malgré la richesse de ses dialogues et la profondeur des personnages, la mise en scène reste accessible : un décor principal, peu d’accessoires, et trois comédiens suffisent à créer une atmosphère saisissante.

Quel type de public apprécie le plus cette pièce ?

Les spectateurs sensibles aux récits d’affrontement entre passé et présent, aux émotions vraies, et aux pièces qui posent des questions de fond sans sacrifier le plaisir du théâtre.

Peut-on y voir un message politique ou symbolique ?

Oui, mais il reste ouvert : Les Enfants de la Tempête parle autant de la France d’hier que de celle d’aujourd’hui. C’est une réflexion sur la mémoire, la fidélité aux idéaux et le courage d’aimer au-delà des clivages.


Extrait des Enfants de la Tempête

Personnages

Jeanvalet de chambre de Thibault.

Thibaultplus jeune, vicomte.

Louise, danseuse.

Le décor

Une chambre dans le château de Bois-le-Vicomte, en 1877. Elle est défraichie. Cependant on a fait un effort pour la rendre agréable : tableaux, portraits de famille. Le mobilier est précieux mais dépareillé : chaises et fauteuils de style Louis XV, bureau de style empire servant de table de travail et de table à manger ; une méridienne de style directoire. Une grande bibliothèque. Trois entrées : l’une donne vers la galerie, l’autre vers la chambre de Thibault et la dernière, plus petite, vers les circulations de service. Une grande fenêtre dont les volets intérieurs sont clos. Au début de la pièce, une paire de gants blancs est posée sur une chaise. Sur une autre chaise, on remarque une redingote sombre ainsi qu’une cravate.

Tableau premier. Thibault.

Scene premiere. Jean, seul.

Jean a la mine grave. Il porte une veste jaune moutarde à rayures et à manches noires. La chaine d’une montre à gousset est accrochée sur un bouton de la veste et disparaît dans une des poches. Sous la veste, une chemise blanche à col cassé est fermée par une cravate noire soigneusement nouée. Les mains nues, une bague à l’auriculaire, Jean porte une petite valise. 

Jeanerrant dans la pièce, sans but. Renvoyé, moi ? Moi qui suis au service de cette maison depuis… C’est impossible ! Je dois rêver. Monsieur n’a pas pu me mettre à la porte… Il n’a pas pu… Et pourtant si, il l’a fait. Comment en sommes-nous arrivés là ? Il s’est laissé abusé par… Non, c’est moi, moi qui n’ai pas su prévoir que… ou plutôt, c’est elle, elle qui a réussi au-delà de tout… Calme-toi. Rassemble tes forces et concentre-toi. La seule façon d’y comprendre quelque chose est de remonter au début de l’histoire. (Il pose sa valise.) Tout a commencé ici, dans le château de Bois-le-Vicomte. Comment ? Vous ne connaissez pas Bois-le-Vicomte ? C’est un petit château, modeste mais plein de charme, niché quelque part dans cette campagne qui se tient à distance de Paris comme de la province. (Il enfile les gants blancs posés sur une des chaises.) Les nuages se dissipaient, monsieur allait mieux. Qui aurait pu prévoir que les éléments se déchaineraient de nouveau contre nous ?

Scene 2. Jean, Thibault.

Thibault entre par sa chambre. Par-dessus son pantalon noir à rayures grises et une chemise blanche dont il n’a pas fermé le col, il porte une robe de chambre rouge bordeaux. 

ThibaultBonjour, Jean.

Jean. Bonjour, monsieur. Tout s’est-il bien passé depuis hier ?

ThibaultCertes, mais je vous attendais plus tôt.

 Jean. La locomotive a eu une avarie un peu avant Montargis.

ThibaultRien ne vaut une calèche et quatre bons chevaux. 

Jean est surpris par cette remarque. Thibault s’en aperçoit et en éprouve une gêne. Jean va à la fenêtre et ouvre les volets intérieurs.

Jean. J’ai plusieurs choses à vous dire.

ThibaultEt moi j’ai un récit à vous faire. 

Jean. J’en serais ravi, monsieur.

ThibaultComme convenu, j’ai reçu hier madame Zambault. 

Jean. Votre entretien a-t-il été fructueux ?

Thibault, s’animant. Elle est partie en claquant la porte. 

Jean. Monsieur se serait-il emporté ?

Thibault, ayant du mal à se contenir. Cette femme est une impie !

Jean, faisant du rangement. Il est vrai qu’on ne voit guère les Zambeault à la messe. 

Thibault, aigre. Madame Zambeault dans une église ? J’en serais le premier surpris. 

Jean. Je vous entends : vous n’êtes pas parvenu à un accord.

ThibaultComment aurions-nous fait ?

Jean. Sa venue témoigne pourtant de l’amélioration de votre réputation.

ThibaultElle s’est résolue à venir faute de donateurs.

Jean. Quel était l’objet de sa visite ?

Thibault, fulminant. Elle venait me réclamer de l’argent pour l’école communale de filles !

Jean. La générosité des Mareschal des Roches était proverbiale, jadis.

ThibaultNous n’avons cependant pas vocation à financer un enseignement dévoyé, qui érige la République en religion laïque. 

Jean. Il est vrai que l’institutrice n’a pas la réputation d’une catholique fervente.

Thibault, explosant. C’est une anticléricale notoire ! Je l’ai d’ailleurs fait remarquer à Mme Zambeault. On l’a plusieurs fois entendue blasphémer. Quant à ses conférences du dimanche matin, elles n’ont qu’une seule visée : vider l’office de ses fidèles ! Il était par conséquent impensable que je versasse la moitié d’un centime pour conforter quelqu’un qui foule au pied nos racines chrétiennes.

Jean. Je reconnais là votre intransigeance.  

Thibault, avec un rictus de satisfaction. Madame Zambeault en a été proprement scandalisée. (Amer .) Elle est partie avec fracas en jurant d’en faire des gorges chaudes. Elle a refusé que je la raccompagnasse, fût-ce dans le vestibule, et elle m’a lancé : « Monsieur le vicomte, rien n’arrêtera la République ! »

Jean. Hélas, c’était à prévoir. (Pensif .) Le conseil municipal connaîtra bientôt l’affaire.

Thibault, essayant de déchiffrer l’expression de Jean. Fallait-il donc se résigner ? Abandonner ? Capituler ?

Jean. Monsieur, si nous voulons faire revenir nos idées sur le devant de la scène, rien ne sert de pécher par excès. La colère attise l’esprit revanchard de nos ennemis, loin de les rallier à notre cause. En outre, un général ne descend pas au niveau d’un fantassin. Un maître doit d’abord être son propre maître. Votre demeure, votre famille et votre histoire vous placent au-dessus des éclats grossiers. Aussi monsieur, permettez-moi ce conseil : soyez conforme à votre titre et tenez votre rang. C’est le meilleur moyen de retrouver la grandeur passée des Mareschal des Roches. 

Thibault, comme libéré d’une tension. Vous avez raison, Jean.

Jean. Le vent est en train de tourner. Les bonnes nouvelles arrivent. Sur le chemin de la gare, j’ai croisé monsieur l’abbé. 

ThibaultComment va-t-il ?

Jean, débarrassant Thibault de sa robe de chambre. Il souhaite que vous l’accompagniez lors du pèlerinage de Vézelay.

ThibaultJ’en suis flatté.

Jean. Nous voyons les premiers fruits du travail que nous menons depuis plusieurs mois pour effacer tout ce qui put vous nuire.

ThibaultCe n’est qu’un pèlerinage.

Jean. Ne le négligez pas. Votre présence en tête de cortège fera sensation et marquera le rétablissement de votre autorité morale. 

ThibaultJ’aimerais vous croire, mais le chemin est encore long.

Jean, aidant Thibault à enfiler sa redingote. Pas si long, monsieur, pas si long : le courrier est arrivé. 

ThibaultQuelles sont les nouvelles ?

Jean. La Gazette nationale de France vous prend votre article. 

Thibault, fou de joie. Voilà qui est fort ! Que ne le disiez-vous ?

Jean. La prose de monsieur a été appréciée à sa juste valeur : précise, convaincante et brillante !

ThibaultCe sont les mots exacts ?

Jean, fermant le col de chemise de Thibault. Ce n’est pas tout. Vous avez également reçu une lettre d’Auguste de Saint-Mont.

Thibault, se figeant. Le comte ?

Jean, nouant la cravate de Thibault. Lui-même : Auguste de Saint-Mont, comte de Saint-Mont et duc de Clairance, président du Cercle de la rue royale. 

Thibault, impressionné. Que veut-il ?

Jean. Votre entrée. 

Thibault, qu’une fierté irradie. Moi ? Au Cercle de la rue royale ? Mais… sur quels motifs ?

Jean, enlevant une poussière sur l’épaule de Thibault. Le comte a eu vent de la fondation du Cercle monarchiste de Châtillon. Il vous félicite pour cette initiative et vous invite rue royale, afin de conférer avec lui des moyens de rétablir la monarchie en France.

Thibault, sur un nuage. J’en suis… honoré…

Jean. Monsieur votre père serait fier de vous. 

Thibault, ému. Vous le croyez ? 

Jean. Comme Monsieur votre frère.

Thibault, très ému. Alors tout est juste. Prions. 

Joignant les mains, Thibault et Jean se mettent en prière. Les yeux clos, ils gardent le silence quelques instants.

Thibault et JeanAmen.

ThibaultLa journée s’annonce meilleure que je ne l’imaginais. (Il prend une canne qui était posée dans un coin. Goûtant à l’avance le plaisir de la promenade .) J’ai envie de sortir.

JeanMonsieur s’est offert une nouvelle canne ?

ThibaultComment la trouvez-vous ?

Jean, pincé. On voit d’emblée qu’il s’agit d’un objet de prix. 

Thibault, amusé. Je vous le confirme. 

JeanSi vous me permettez un conseil, je suggère à monsieur le vicomte d’agir avec plus de modération.

Thibault, changeant de visage. Que cela signifie-t-il ?

JeanCela signifie, monsieur le vicomte, que je vous recommande à l’avenir de mieux peser vos dépenses.

ThibaultVous me disiez que la réputation des Mareschal des Roches impliquait la libéralité. Il serait bon d’en avoir l’apparence.

JeanIl serait bon, aussi, d’en avoir les fonds.

Thibault, soudain inquiet. Expliquez-vous.

JeanIl reste une lettre dont je ne vous ai pas parlé. Une lettre de M. Mallet. M. Mallet en personne. Il demande à monsieur un rendez-vous.

ThibaultLui aussi ? (Tentant de rester léger .) J’ai du succès à Paris, en ce moment …

JeanIl souhaite envisager la fermeture de votre crédit.

Thibault, abasourdi. Que se passe-t-il ?

JeanSelon toute apparence, vos créanciers font du bruit.

Thibault, méprisant. Qu’ils braillent !

JeanM. Mallet vous somme de contracter un emprunt. 

Thibault, se raidissant. On ne « somme » pas le vicomte Thibault Mareschal des Roches. Donnez-moi les œuvres épistolaires de ce gratte-papier. (Lisant la lettre que Jean lui tend .) « Je vous prie de vouloir bien vous présenter à mon bureau le dix-huit courant à onze heures, afin de procéder à la fermeture de votre crédit ainsi qu’à l’établissement de votre dette totale et des moyens d’y mettre ordre. » (S’asseyant, touché .) Les caisses sont vides. 

JeanJ’en ai peur, monsieur. 

Thibault, perdu. Mais… mais comment cela a-t-il pu ? …

JeanLa campagne électorale de monsieur a été coûteuse. De plus, la victoire nous ayant échappé, les recettes se sont raréfiées.

Thibault, éclatant. En somme, mon infortune est liée à l’élection de Palissandre à la députation !

JeanJe ne saurais mieux dire.

Thibault, se levant, très nerveux. Qu’allons-nous faire, Jean ?

Un silence, durant lequel Thibault marche de façon erratique, tandis que Jean demeure impassible.

Thibault, s’arrêtant soudain. Je crois que je devrais sans doute… trouver un emploi.

JeanVous ? Un vicomte ? Travailler ? Vous n’y pensez pas !

ThibaultJe ne vendrai pas le château.

JeanJe vous approuve.

ThibaultComment faire ?

JeanIl y a peut-être une solution : un orphelinat.

ThibaultUne institution ? Faire du château une institution ?

JeanNous accueillerions celles et ceux qui n’ont plus de parents.

ThibaultPas question. Les travaux de transformation seraient trop nombreux. Toucher à la demeure de mes ancêtres me serait insupportable.

JeanLes transformations ne seraient qu’intérieures et n’affecteraient pas l’extérieur. 

Thibault, s’emportant. Ce château revenait à Henri ! Je lui dois de le garder en état et je refuse qu’il soit défiguré. 

JeanEt si cet orphelinat était réservé aux enfants perdus des grandes familles de France ?

Thibault, après un temps de réflexion. Un orphelinat pour nobles ? D’où vient cette idée baroque ?

JeanLe siècle n’est pas tendre envers ceux qui portent des titres de noblesse. Bien des maisons se sont effondrées sous le fracas des émeutes, des coups d’état, des révolutions, des guerres. Combiens de petits barons ou de petites comtesses déchues sont-ils contraints de vivre dans des conditions indignes ? 

ThibaultEn quoi cela me concerne-t-il ?

JeanMonsieur, vous avez la grâce de faire partie de ceux qui sont d’une essence supérieure. Certes, vous avez des devoirs envers votre père, envers votre frère, Dieu ait leur âme. Mais vous avez aussi un devoir de charité envers ceux qui, comme vous, oserais-je dire, n’ont plus leur famille proche. (Thibault se montre sensible à ces mots.) Si vous le vouliez, votre demeure pourrait devenir leur havre. Songez à l’image que Bois-le-Vicomte acquerrait aux yeux de toute l’aristocratie française. Songez aussi au prestige retrouvé de votre nom.

ThibaultMais comment trouver l’argent ?

JeanLe comte d’Isigny est prêt à soulever des fonds et la duchesse de Brézé s’est enflammée à cette idée.

ThibaultVous leur en avez parlé ?

JeanCroyez-moi monsieur, l’éclaircie est proche. Par contre, je me permets de revenir à la charge sur un sujet dont nous avons déjà abondamment parlé : si monsieur pouvait enfin se décider à prendre une épouse…

Thibault, souriant. Je vous le promets, Jean.

Jean, souriant également. Vous voilà enfin raisonnable !

ThibaultNe l’ai-je pas toujours été ?

Jean, gentiment moqueur. Pas toujours monsieur, pas toujours…

ThibaultQu’avez-vous à me reprocher ?

JeanIldebrand von Richter. 

ThibaultEncore ?

JeanJe ne m’explique toujours pas les raisons qui vous ont poussé à l’éconduire. Elle était très éprise.

Thibault, sec. Moi, non. 

JeanC’était pourtant un parti des plus intéressants : des châteaux en Bavière à n’en plus finir, des lieues de forêts où chasser le loup de la Toussaint jusqu’à Pâques, des mines de charbon, des usines d’acier…

Thibault, mal à l’aise. Le patrimoine ne fait pas tout. Il me suffisait que la duchesse de Richter apparaisse pour sentir souffler le vent glacé de la Prusse…

JeanCertes, son abord n’était pas des plus aimables…

ThibaultVous en convenez !

JeanMais la marquise de Bellac ? La baronne de Chaizy ? Des femmes délicieuses et bien nées, qui n’attendaient qu’un signe de votre part pour…

Thibault, brusque. Assez ! (Après un temps.) Je… je ne suis pas encore prêt…

Jean, sortant un trousseau auquel sont accrochées de nombreuses clefs. Il faudra y remédier.

Thibault, saisi par l’audace de son valet. Comment ?

JeanJe dis qu’il faudra y remédier. Le vicomte Mareschal des Roches ne saurait se passer d’un héritier.

Jean sort tandis que Thibault demeure seul, préoccupé.

***

Tableau 2. Morts et vivants.

C’est la nuit. Seule la lumière frêle d’une veilleuse éclaire la pièce. 

Scene 1. Thibault, seul.

Thibault s’est endormi dans la méridienne, un livre à la main. Immobile, il respire doucement. Soudain, sa respiration s’accélère ; il s’agite et se débat.

ThibaultPère… Père ! … Les chevaux, les chevaux ! … Tenez-leur la bride haute !… Prenez garde… Le Loing ! … Non ! … Henri ! … Henri ! 

Il se réveille et halète, épouvanté.

Scene 2. Thibault, Jean.

Jean, accourant.  Monsieur ! (Regardant Thibault .) Encore votre cauchemar ? (Posant la main sur l’épaule de Thibault, qui continue de reprendre son souffle.) C’est passé, monsieur. Je suis là. Puis-je vous apporter une infusion ?

ThibaultAllez chercher le docteur Philibert.

Jean.  À cette heure ?

ThibaultCela fait trop longtemps que ces visions m’assaillent.

Jean.  Ce n’est pas une bonne idée.

ThibaultJe veux qu’elles disparaissent. Cela devient une obsession !

Jean.  Si je réveille le docteur Philibert, votre réputation sera compromise. Dès demain, Châtillon ne parlera que de cela.

ThibaultPeu m’importe !

Jean, avec autorité.  Eh bien il m’importe, moi ! Je ne laisserai pas votre honneur être livré aux chiens de la place publique.

Thibault, après un temps. Alors, que faire ?

JeanHélas, monsieur, chacun doit apprendre à vivre avec ses fantômes.

Jean sort, tandis que Thibault ne se recouche pas et demeure les yeux plongés dans l’inquiétude. 

***

Tableau 3. Louise.

Le lendemain. Thibault est allongé sur la méridienne et lit. Dehors, il pleut très fort.

Scene 1. Thibault, Jean.

Jean, entrant, trempé. Je ne reconnais plus les environs.

Thibault, sans quitter des yeux son livre. Nous en avons vus d’autres.

JeanNon monsieur ! C’est un véritable déluge !

Thibault, posant son livre. Que voulez-vous que j’y fasse ? Construire une arche ?

JeanLa pluie entre dans le château par la façade nord. Les combles sont trempés. Déjà, l’eau s’infiltre dans les plafonds du troisième étage.

ThibaultCela fait longtemps que c’est ainsi. Il faudrait réparer la toiture, mais que voulez-vous ? Nos finances…

JeanVous ne comprenez pas ! Le Loing et le canal de Briare sont en crue. Ils sont sortis de leurs lits et se sont rejoints pour ne former qu’un seul fleuve. L’étendue d’eau est énorme et bouillonnante. Elle grossit un peu plus à chaque minute !

Thibault, se levant. Il y a des dégâts ?

JeanLes maisons alentours sont toutes inondées. L’eau continue de monter. Elle a atteint le parc. Le courant a fait tomber les deux lions qui gardaient l’entrée. Ils se sont écroulés au milieu de tourbillons boueux et ont disparu. Les grilles du château ont cédé et se sont ouvertes. 

Thibault, le visage barré. Même 1789 n’y est pas parvenu…

JeanLe château est désormais librement abordable par le fleuve.

ThibaultIl n’en faudra pas plus pour que des pillards nous rendent visite à la première occasion.

JeanJe vais à Châtillon chercher de l’aide. 

ThibaultComment ferez-vous ?

JeanJe passerai par le bois, il est encore à sec.

Jean sort rapidement.

Scene 2. Thibault, puis Louise.

Thibault s’assoit à son bureau et commence à écrire une lettre. Quelque temps après, par la porte donnant sur la galerie, Louise apparaît. Elle avance doucement. Elle porte un manteau et un chapeau de pluie, trempés. Soudain, elle aperçoit Thibault et se fige. Lui ne l’a pas vue ; il continue à écrire, concentré. Tout se passe comme si, dans ce moment de silence, elle le saisissait tout entier. Tout à coup, Thibault la voit.  

Thibault, se levant. Qui êtes-vous ?

LouisePardonnez-moi, j’ai appelé, mais personne n’a répondu…

Thibault, la coupant. Vous êtes ici dans un appartement privé. 

LouiseJ’en suis navrée… je ne voulais pas… (Se présentant .) Louise Duprat. 

Thibault, la considérant et retournant ce nom dans sa tête. Louise Duprat… Bien entendu ! Votre visage me disait quelque chose, mais le nom m’échappait…

LouiseJe viens solliciter votre aide…

ThibaultQue faites-vous ici ?

LouiseNous sommes voisins…

ThibaultSortez.

LouisePardonnez-moi ?

ThibaultJe vous demande de sortir, madame. 

Louise, déstabilisée par cet ordre. Je n’attendais certes pas un tel accueil de la part d’un gentilhomme. 

ThibaultQu’espériez-vous ?

LouisePlus de savoir-vivre. 

ThibaultDu savoir-vivre ? Pour une catin ? En vérité, vous êtes burlesque.

Louise, secouée par l’insulte. Enfin, monsieur !…

ThibaultLe mot de catin vous choque ? C’est pourtant le vôtre. 

LouiseIl est vrai…

ThibaultJe vous cite de mémoire : « Si une catin est une femme qui considère que l’amour est une chasse et l’homme un gibier, alors je suis une catin et j’en suis fière ! »

Louise, surprise. Je vois que vous connaissez ma prose. 

ThibaultQui ne la connaît pas ? Toute la presse a publié vos frasques immorales et cet orgueil qui vous pousse à en faire un étendard. Il est vrai que pour devenir danseuse aux Folies Bergères, point n’est besoin de prix de vertu. 

Louise, s’inclinant. Monsieur, je vous supplie de jeter un voile sur vos réticences, que je comprends, et d’écouter ma requête.

Thibault, surpris par cette révérence, après un temps. Parlez. 

Louise, se redressant. Je vous remercie. J’habite l’une des maisons mitoyennes de votre parc, au sud.

ThibaultJe vous pensais parisienne. 

LouiseC’est une maison de campagne. 

ThibaultCelle du père Leleu ?

LouiseJ’en suis désormais la propriétaire. 

ThibaultJe la connais. Elle est charmante. 

LouiseÉtait. 

ThibaultComment ?

LouiseÉtait charmante. Elle est désormais dévastée par les eaux furieuses du Loing. 

ThibaultAh… J’en suis désolé. 

LouiseTout est allé si vite. La porte d’entrée défoncée, les meubles emportés, mes livres… je… je n’ai plus rien. (Elle est très émue.) Dans sa furie, le fleuve a jeté une barque au beau milieu de ce qui était mon salon. Alors j’y suis montée et je… je me suis enfuie. (Le regard de Thibault change : c’est comme s’il la regardait maintenant pour la première fois.) J’ai cru… au milieu de ce fleuve fou, j’ai bien cru passer par-dessus bord. Je voyais filer sur l’eau des morceaux de bois, des lits, des fauteuils, des ordures et puis… j’ai entendu des cris et j’ai aperçu deux personnes… deux personnes qui hurlaient et qui ont soudain disparu dans un tourbillon. Elles sont remontées à la surface, un peu plus loin mais… elles ne criaient plus. Elles semblaient étouffer et se débattre contre une emprise invisible et puis… elles ont fini par être englouties par le fleuve. Alors j’ai… j’ai été puiser au fond de moi ce qui me restait de force. Je ne sais comment j’ai fait mais, j’ai empoigné les rames et de toute ma volonté j’ai mené ma barque en direction de la rive. Dès que j’ai pu, j’ai mis pied à terre. J’ai marché. Arrivée devant vos murs, je me suis effondrée. J’étais comme… vidée. J’ai remarqué deux fenêtres éclairées. La porte était entr’ouverte. Je suis entrée. J’ai erré au rez-de-jardin. J’ai traversé plusieurs pièces sombres, froides, drapées de blanc. Les meubles étaient pareils à des fantômes. J’ai trouvé l’escalier. Une lumière douce et de la chaleur descendaient du premier étage. Je les ai suivies et je vous ai trouvé. 

Thibault, après un silence. Mais vous avez frôlé la… (Il ne continue pas, impressionné.)

LouiseJ’ai failli mourir, je crois. 

ThibaultAsseyez-vous, madame. 

Louise, s’asseyant. Merci, monsieur. 

Thibault, lui servant un verre. Buvez. 

Louise, buvant mais surprise par la force de l’alcool. Qu’est-ce que c’est ?

ThibaultJe pensais qu’il vous serait familier. L’eau-de-vie du père Leleu. 

LouiseCe brave homme m’aura donc porté secours même après sa mort. 

ThibaultPermettez-moi de vous offrir l’hospitalité, aussi longtemps que vous en aurez besoin. 

LouiseJe ne voudrais pas vous déranger. 

ThibaultMe déranger ? Vous êtes la personne la plus brave que ce château ait vue depuis longtemps !

LouiseJ’ai cru remarquer que toutes les pièces du château n’étaient pas employées et je ne voudrais pas être une charge qui…

ThibaultJe ne chauffe que les pièces nécessaires et j’en chaufferai une de plus, pour vous servir, madame.

LouisePourtant une femme de ma réputation pourrait nuire à la vôtre et je…

ThibaultVeuillez accepter mes excuses pour la façon dont je vous ai accueillie. 

LouiseVous n’avez rien dit qui ne soit exact. 

ThibaultPeut-être, mais si mon père avait été là, il n’aurait pas manqué de fustiger mon comportement comme indigne des murs de ce château. 

LouiseC’est une bâtisse étonnante. 

ThibaultIl est vrai. J’espère lui redonner son éclat.

LouiseCe que j’ai vu m’a charmé.

ThibaultPas assez. J’aurais aimé vous accueillir dans une maison où chaque pièce aurait été baignée de la claire lumière des lustres de cristal, où chaque cheminée aurait brûlé d’un bon feu de mon bois tendre. 

LouiseMais… c’est pourtant bien ce que je vois dans cette pièce. 

ThibaultLa décoration y est un peu ancienne…

LouiseElle est authentique. On sent que chaque meuble, chaque objet est… comment dire… vivant, animé.

Thibault, souriant. Je suis heureux que vous y soyez sensible. Bien des gens ne voient en Bois-le-Vicomte qu’un vieillard malade. Vous venez de me prouver qu’en son centre bat encore un cœur, vibre encore une âme qui ne demande qu’à remettre en mouvement ce grand corps en hibernation. Mais je manque à tous mes devoirs et ne vous ai pas encore débarrassée.

Louise se lève. Elle enlève son chapeau, que Thibault prend, laissant apparaître des cheveux noués par un ruban, dans lesquels sont accrochées des fleurs des champs. Puis Thibault débarrasse Louise de son manteau, ce qui dévoile une robe ajustée. Louise porte également une parure de fleurs sur l’épaule gauche. Thibault la contemple presque malgré lui.

Louise, sortant un fume-cigarette d’un étui, l’allumant au moyen d’une bougie et fumant. Vous permettez ? (Thibault se montre saisi par ce geste.) C’est mon tour de vous choquer, on dirait… 

Thibault, quelque peu contrarié. Faites à votre guise, vous êtes mon invitée.

Louise, regardant les livres de Thibault. Je suis impressionnée par tant d’érudition, M. le vicomte. 

ThibaultVous vous moquez…

LouiseJe suis sincère.

ThibaultJe n’en ai pas lu un seul. Je vous supplie de n’en rien dire pour ne pas écorner davantage un blason déjà entaché.

Louise, riant. Dès demain, tout Châtillon le saura, comptez sur moi !

Thibault, s’amusant. Hélas, ce secret ne pouvait le rester indéfiniment.

Louise, souriant, considérant l’imposante bibliothèque. Je constate en tout cas qu’on a bien exagéré les malheurs de la Révolution. Nous ne vous avons pas tout pris, loin de là. 

Thibault« Nous » ? Qui est ce « Nous » ?

LouiseLe peuple. 

ThibaultTiens ! Vous êtes du peuple ?

Louise, avec un air de défi. Comme vous. (Léger silence.) Si l’on y pense bien.

ThibaultJe l’eusse aimé. Mais il ne peut en être question.

Louise, ironique. Je l’aurais juré…

ThibaultLa seule richesse du peuple est sa force de travail. 

LouiseVicomte, nous sommes d’accord. 

Thibault, soupirant. Ma seule richesse à moi est cette vaste demeure. 

Louise, provocatrice. Votre richesse vous ennuie ?

ThibaultMa richesse qui m’a rendu pauvre. 

LouiseVendez. 

ThibaultHélas ! Je scellerais ma destinée : hanté jusqu’à la fin de mes jours par le fantôme de mon défunt père !

LouiseJ’en serais désolée. 

ThibaultEt moi je suis tout le contraire. Non pas désolé, privé de sol, mais profondément ancré dans les racines de cette terre, celle de ma famille depuis plus de quatre siècles, celle des vicomtes Mareschal des Roches. (Ce disant : il montre quelques portraits accrochés au mur.)

Louise, observant tour à tour les portraits et Thibault. Ce nom me dit quelque chose… Attendez… Mais oui ! Le vicomte Thibault Mareschal des Roches ! Vous étiez candidat à la députation ?

Thibault, gêné. Euh… oui…

LouiseEt vous avez été battu par André Palissandre !

Thibault, faisant grise mine. C’est cela…

LouisePardonnez-moi, j’ai ravivé un mauvais souvenir… 

Thibault, se raidissant. Vous vous en êtes tenue au rappel d’un fait. 

Louise, riant. Que voulez-vous, M. le vicomte ? L’avancée de la République est inexorable. 

ThibaultVous aussi ?

LouiseLes tenants de la monarchie s’accrochent, mais l’avenir de la France est dans la République. 

ThibaultNe nous enterrez pas trop vite. 

LouiseNous ne voulons enterrer personne. Nous souhaitons que tous, ouvriers et bourgeois, paysans et aristocrates, femmes et hommes, vivent libres et égaux en droits. 

ThibaultJ’ai lu cela quelque part… 

LouisePeut-être sous la plume d’Antoinette… 

Thibault, s’échauffant. Antoinette ? Cette communarde féministe, romantique et revancharde qui, à longueur d’articles, appelle à la haine contre les plus vieilles familles de France ? Elle est de vos amis ?

LouiseC’est moi. 

Thibault, après un temps. Je vous demande pardon ?

Louise. Antoinette est mon nom de plume. 

Thibault, désorienté. Je vous croyais danseuse ?

LouiseJe suis aussi journaliste.

Thibault, sarcastique. Si je comprends bien, le lundi vous défendez la cause des femmes et le reste de la semaine vous vous déshabillez devant des pères de familles pour quelques billets ?

Louise, avec un sourire effronté. Tout travail mérite salaire.

ThibaultVous appelez cela un travail ?

LouiseUne femme mariée dansant avec son époux ou avec d’autres hommes, n’est-ce pas aussi un travail ? Et lorsqu’elle s’habille, se maquille, accomplit son devoir conjugal, n’aurait-elle pas droit à … 

Thibault, outré. Assez !

LouiseRassurez-vous : si je suis républicaine, je suis aussi contre la peine de mort. Ainsi, avec moi, vous ne risquerez pas d’être guillotiné. 

Thibault, criant. Taisez-vous !

Louise, se mordant les lèvres, après un temps. Je vous ai heurté.

Thibault, après un temps. Je n’ai pas l’habitude de perdre ainsi mon calme, mais dans ma famille… la guillotine n’est pas une simple idée abstraite…

LouiseJe vous présente mes excuses. 

Thibault, vers les livres. Certains de ces ouvrages pourraient peut-être vous intéresser. 

LouiseJe croyais que vous n’en n’aviez lu aucun ?

ThibaultMon frère l’a fait pour moi. (Prenant un livre .) Je vous recommande Les Soirées de Saint-Pétersbourg de Joseph de Maistre. Il y montre comment bien des désordres de l’Histoire ne sont dus qu’à la ProvidenceVous lirez également avec profit l’Essai analytique sur les lois naturelles de l’ordre social de Louis de Bonald, dans lequel l’auteur révèle combien la liberté individuelle peut être destructrice pour l’ordre social. (Il tend les deux livres à Louise.)

Louise, sans les prendre. Vicomte, me prenez-vous pour une enfant ? 

ThibaultMais non ! …

LouisePensez-vous qu’il faille faire mon éducation politique ?

ThibaultVous vous méprenez sur mes intentions…

LouiseJe n’ai pas besoin de livres pour forger mes convictions. Il me suffit d’aller par les villes, les faubourgs, les villages et les champs. Il me suffit de regarder celles et ceux qui y vivent, y travaillent, y souffrent. C’est une simple question de bon sens !

ThibaultEt j’en suis dépourvu, n’est-ce pas ?

Ils se regardent, têtus, sans rien dire.

ThibaultN’avez-vous pas porté avec vous quelques affaires ?

LouiseJe les ai laissées dans le vestibule. 

ThibaultAllez les chercher, je vais faire préparer votre chambre.

LouiseVicomte, si ma présence doit vous causer quelque désagrément, j’aime autant…

Thibault, ironiquement aristocratique. Je vous en prie, madame. Quoiqu’affreusement traditionnalistes et contre-révolutionnaires, les Mareschal des Roches n’ont jamais failli aux lois de l’hospitalité.

Louise, souriant. Merci, monsieur. 

Elle sort. Thibault regarde les deux livres qu’il a encore dans les mains. Il sourit et les remet en place.

Scene 3. Thibault, Jean.

Jean, entrant par la porte de service. Monsieur ! Châtillon est plongée dans une panique effroyable et je n’ai pu…

ThibaultJean, vous préparerez la chambre d’Henri.

Jean, surpris. Monsieur reçoit ?

ThibaultNotre voisine, Louise Duprat.

Jean, après un temps. Monsieur la connaît ?

ThibaultSa maison a été inondée. 

JeanJe ne sais où j’ai entendu parler d’elle…

ThibaultDans le journal, certainement. 

JeanMonsieur se moque…

ThibaultVous connaissez Antoinette ?

JeanLa journaliste ?

ThibaultC’est elle. 

JeanN’est-ce pas elle qui a écrit plusieurs articles virulents contre la monarchie ?

ThibaultJe le crains. 

JeanMonsieur est-il certain que…

ThibaultCette femme nous tient pour peu de chose, nous et tous les représentants de la noblesse. 

JeanEn ce cas, pour quelle raison…

ThibaultNous allons lui montrer ce qu’est vraiment un aristocrate. 

Souriant, Thibault sort, tandis que Jean reste seul, intrigué.

***

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