Préparer un spectacle de théâtre amateur en 6 mois : le carnet de bord des Baladins à paillettes première partie

Ce premier volet couvre les trois premiers mois : choisir la pièce, distribuer les rôles, lancer les répétitions, communiquer et boucler le budget. Dans un deuxième article, nous vous raconterons la suite de l’aventure, jusqu’au lever de rideau.

Valombreuse-en-Drômois, petite commune de 4000 âmes, 6 mois avant le lever de rideau. Notre troupe de théâtre amateur Les Baladins à paillettes se lance un défi excitant : monter une comédie en 6 mois. À travers ce carnet de bord chronologique, je vous embarque dans l’envers du décor de la préparation d’un spectacle de théâtre, avec ses obstacles, ses fous rires et ses victoires. Préparer un spectacle de théâtre amateur est une aventure collective riche en enseignements – et nous allons vous le raconter, mois après mois, comme si vous y étiez. (Et qui sait, peut-être cela vous donnera-t-il envie de monter à votre tour votre pièce ?) 😉

Avant de plonger dans le récit, nous établissons un planning sur 6 mois pour notre spectacle amateur, afin de ne rien oublier d’important. Comme on dit, « une représentation théâtrale réussie est une suite de catastrophes évitées de justesse ». Autant anticiper chaque étape pour éviter stress et oublis inutiles. Allez, c’est parti pour les préparatifs de notre comédie à jouer en amateur !

6 mois avant la première – Choisir la pièce

Tout commence le 8 septembre par le choix du texte. En ce début de saison théâtrale, autour d’une grande table, cafés fumants en main, l’excitation est palpable : quelle pièce allons-nous monter cette année ? Chacun y va de sa suggestion : un vaudeville classique ? une création originale ? une comédie moderne ? L’enjeu est de trouver LA comédie qui convienne à toute la troupe (et croyez-moi, mettre d’accord 10 comédiens amateurs, ce n’est pas un mince affaire !). Très vite, on élimine les textes à trop petit casting ou aux décors irréalisables avec nos moyens. Notre troupe Les Baladins à paillettes compte 10 passionné·e·s, il nous faut donc une pièce suffisamment flexible en nombre de rôles et techniquement abordable.

Après quelques réunions et pas mal de lectures, notre choix se porte sur « Adultère et Conséquences » de Rivoire & Cartier. C’est un coup de cœur immédiat. D’abord, la distribution s’adapte parfaitement à nos effectifs  – parfait pour caser tout le monde chez nous. Sur rivoireetcartier.com, on a pu lire plusieurs pièces en fonction du nombre d’interprètes. Il est très facile d’accéder à des pièces qui correspondent exactement à notre nombre de femmes et d’hommes. Pas de jaloux, chacun·e aura un rôle ! Ensuite, cette comédie contemporaine est rythmée et hilarante, pleine de quiproquos bien ficelés qui nous font déjà rire aux éclats lors de la lecture. Autre atout non négligeable, Adultère et Conséquences n’exige qu’un décor simple (l’intrigue se passe dans un cabinet médical), ce qui nous facilitera la vie et réduira les coûts de production. Et évidemment, le thème vaudevillesque de l’adultère promet des situations universelles et intemporelles, qui feront mouche auprès du public.

En bref, Adultère et Conséquences coche toutes les cases pour une compagnie amateur comme la nôtre. Après une dernière hésitation (certains d’entre nous redoutaient le côté « vaudeville » un peu suranné, vite rassurés par l’aspect très moderne de l’écriture), la décision est prise à l’unanimité : ce sera « Adultère et Conséquences »

(Petite note de metteur en scène : sitôt la pièce choisie, nous entreprenons les démarches administratives – demande d’autorisation de représentation auprès de la SACD – histoire d’être en règle le moment venu. Un détail à ne pas oublier quand on monte un projet théâtral !)

5 mois avant la première – Distribution du texte et des rôles

Place maintenant à la distribution du texte et des rôles. Nous sommes à environ 5 mois de la première, le 1eroctobre, réunis pour la première lecture complète de la pièce. Les scripts fraîchement imprimés (un joli pavé d’une centaine de pages) circulent parmi les comédiens. L’atmosphère oscille entre jubilation et nervosité : chacun·e brûle de découvrir son personnage, mais qui héritera du rôle du docteur Marianeau, le protagoniste volage ? Et qui jouera Laurence, son épouse trompée au caractère bien trempé ?

La répartition se fait dans la bonne humeur, non sans quelques suspenses. Deux de nos camarades étaient tentés par le même rôle comique – un patient farfelu – mais en lisant à tour de rôle quelques répliques à haute voix, le choix s’impose de lui-même et tout le monde finit par trouver chaussure à son pied. 

Quand vient le moment de la première lecture collective autour de la table, c’est un pur bonheur. Nous découvrons peu à peu l’intrigue et les répliques savoureuses de la comédie. Les rires fusent, parfois à des moments inattendus. Ainsi, lorsque l’un de nos comédiens déclame (avec un sérieux imperturbable) la réplique de Marianeau « Alors là… si la SNCF se met à faire grève, c’est la fin de tout ! », toute la troupe éclate de rire – car figurez-vous qu’une grève surprise des trains avait justement failli mettre en péril notre lecture. L’art imitant la vie, en quelque sorte ! Ces premiers éclats de rire collectifs nous confirment que nous tenons la bonne comédie : celle qui nous amuse nous-mêmes aura toutes les chances de faire rire le public.

Rôles distribués, textes en main, chacun repart de cette séance de lecture le cœur léger et le visage déjà douloureux à force de sourire. L’aventure est officiellement lancée : notre planning de 6 mois pour monter cette pièce amateur est enclenché !

À 4 mois – Répétitions en cours : premiers obstacles

Les semaines suivantes, nous entrons dans le dur : répéter le texte encore et encore, voilà notre quotidien des 4 mois avant la première. Tous les mardis soir et samedis matin, la troupe se retrouve dans la petite salle des fêtes de Valombreuse pour travailler les scènes une à une. Au début, le texte à la main, puis de plus en plus en place et en mémorisation.

Très vite, un premier obstacle se dresse : la mémoire. Apprendre ses répliques n’est pas une mince affaire pour tout le monde. Notre doyen, Jean-Marc, qui joue l’ami gaffeur Bourrassol, peine à retenir son texte. Lors d’une répétition, il perd le fil en plein milieu d’une scène cruciale, s’interrompt et s’exclame en riant « Ah oui… Quel emmerdement !… Enfin… je veux dire… quel dommage… », reprenant mot pour mot la réplique de Marianeau quand il est pris au dépourvu dans la pièce. 🤭 Fou rire général ! Cette auto-dérision soude encore un peu plus le groupe et détend l’atmosphère. Loin de nous décourager, les petits trous de mémoire deviennent presque des blagues internes : on s’entraide, on souffle gentiment les répliques oubliées, et on avance.

Autre défi des répétitions : le rythme endiablé du vaudeville. Les portes qui claquent, les entrées et sorties précipitées, les quiproquos qui s’enchaînent – il faut une précision d’horloger pour que la mécanique prenne vie. Les premières mises en place sont… sportives ! On se rentre dedans en sortant de scène, on loupe des entrées, bref c’est encore très brouillon. Après un mois de répétitions, j’avoue avoir eu un petit moment de panique intérieure en me demandant comment tout cela va bien pouvoir être prêt à temps. Mais la troupe fait preuve de ressources : on ajoute des répétitions supplémentaires le dimanche, on organise même un week-end intensif « cohésion et théâtre » chez l’une des comédiennes qui a une grange aménageable. Au menu : répétitions toute la journée, et raclette-partie le soir pour renforcer l’amitié. Travail et convivialité, c’est notre recette ! 

Peu à peu, les scènes prennent forme. Les personnages s’affinent, chacun apporte ses idées. On s’autorise à improviser légèrement pour trouver LE gag qui marche. Par exemple, dans une scène où trois personnages se disputent en cacophonie, une actrice a fait un petit geste comique spontané qui est devenu un running-gag à chaque répétition. L’ambiance est studieuse mais toujours joyeuse – on ne compte plus les fous rires quand l’un de nous surjoue volontairement une réplique pour faire rire les autres (mention spéciale à Claire qui, jouant la sévère Mme de Marcy, s’amuse à toiser ses camarades d’un air pincé, ce qui provoque immanquablement l’hilarité générale). Malgré la fatigue qui peut se faire sentir, on tient bon : l’esprit d’équipe porte la troupe. Chaque obstacle surmonté nous rend plus confiants et plus unis.

À 3 mois – Diffuser le spectacle : réservations et communication

À trois mois du grand soir, une nouvelle étape cruciale démarre en parallèle des répétitions : diffuser le spectacle. Concrètement, cela signifie réserver la salle, fixer les dates de représentations et commencer à attirer le public. Notre Valombreuse est une bourgade modeste, mais dotée d’une salle polyvalente de 200 places que nous convoitons. Obstacles en vue : le calendrier municipal est chargé, et il faut jongler avec les autres événements (le bal du Club du Joyeux automne, le loto de l’amicale de pétanque…) pour trouver notre créneau.

Après quelques négociations serrées à la mairie (imaginez-nous, troupe de saltimbanques, plaidant notre cause devant un adjoint au maire un peu guindé – toute ressemblance avec une scène de théâtre est purement fortuite 😅), nous parvenons à bloquer deux soirées : les vendredi et samedi du premier week-end de mars. Parfait, cela nous laisse les 3 mois restants pour remplir la salle.

Et remplir la salle, voilà notre prochain défi. Place à la communication et à la prospection du public ! Affiches, tracts, réseaux sociaux, bouche-à-oreille… on active tous les leviers. Notre graphiste en herbe, Céline, concocte une affiche haute en couleur : en toile de fond, un gros cœur dessiné en trompe-l’œil sur une porte de cabinet médical (clin d’œil à l’intrigue d’adultère), et un slogan accrocheur. On décide d’un ton résolument humoristique pour bien montrer qu’il s’agit d’une comédie grand public. Les affiches partent chez l’imprimeur (gracieusement prises en charge par la mairie, petit coup de pouce bienvenu) et bientôt, elles fleurissent dans les commerces du coin et sur les panneaux d’annonce de la ville.

Malgré cela, l’inquiétude nous gagne : et si la salle restait déserte ? Les premières semaines, les réservations arrivent au compte-gouttes. On guette fébrilement le site de billetterie en ligne pour voir le nombre de places vendues… qui stagne désespérément. « Et s’il n’y avait que trois spectateurs, on fera la pièce quand même… au moins ils auront droit à un spectacle privé de théâtre ! » plaisante l’un d’entre nous pour détendre l’atmosphère. Pour ne rien cacher, quelques insomnies pointent le bout de leur nez – votre serviteur a connu des nuits agitées à imaginer la salle à moitié vide. (La veille de l’ouverture des locations, je n’ai pas fermé l’œil de la nuit, dis-je, un peu comme Laurence dans la pièce qui ronge son frein toute la nuit en soupçonnant son mari !).

Heureusement, notre plan d’attaque porte ses fruits. Un article dans La Gazette du Clocher, agrémenté d’une photo amusante de la troupe en costume de médecins et patients, suscite la curiosité. Les réservations commencent enfin à décoller. Le bouche-à-oreille fait son œuvre : les collègues, les amis d’amis, tout le monde retient la date. Ouf – le public sera au rendez-vous ! Voir la liste des réservations s’allonger nous donne un regain d’énergie formidable pour aborder la dernière ligne droite.

Sponsoring et budget : la quête des sponsors

En parallèle de la promo, nous devons aussi penser budget. Monter un spectacle amateur, même avec des bouts de ficelle, entraîne quelques frais : location (ou prêt) de la salle, costumes, accessoires, impressions des programmes… Pour équilibrer tout ça, nous partons en recherche de sponsors locaux. Trois mois avant la première, on établit un dossier de sponsoring listant nos besoins et les contreparties (logo sur l’affiche, remerciements publics, etc.). C’est une démarche nouvelle pour certains d’entre nous, qui se transforment en VRP du théâtre le temps de quelques semaines.

Mais trouver des sponsors n’est pas un long fleuve tranquille. On essuie poliment plusieurs refus – le garagiste du coin, bien que fan de vaudeville, n’a pas le budget ; le supermarché a déjà sponsorisé le Club Ornitho du Merle Jovial… Le moral prend un petit coup. Pourtant, on persévère, « on ne plaisante pas avec les horaires »de notre plan de production, et on continue nos démarches comme prévu (il faut bien boucler le budget !).

Finalement, à force de toquer à toutes les portes, la chance nous sourit. La pharmacienne du village, ravie qu’une pièce de théâtre se monte chez nous, accepte de sponsoriser une partie des costumes (après tout, Adultère et Conséquences se passe chez un médecin, clin d’œil parfait à son métier). Mieux : le gérant d’une brasserie locale, La Mousse des chauds-bouilleurs, que l’un de nos comédiens connaît, propose un petit coup de pouce financier en échange d’une pub dans le programme. Ce même camarade, ravi de sa négociation, nous annonce la nouvelle en fanfare lors d’une répétition. Je ne peux m’empêcher de lui lancer en souriant, reprenant une réplique de la pièce : « Je ne sais pas ce que je ferais sans vous… »

Avec ces sponsors, notre budget est quasi bouclé. On pourra même offrir un pot de l’amitié après la dernière représentation ! C’est plus qu’il n’en fallait pour nous remotiver : désormais, plus rien ne nous arrêtera. 

Et la suite du carnet de bord ?

Pour l’instant, Les Baladins à paillettes ont choisi leur pièce, distribué les rôles, lancé les répétitions, réservé la salle et trouvé leurs premiers sponsors. Bref : le projet existe… mais il reste encore à le mettre en chair.

Dans le deuxième volet de ce carnet de bord, nous vous emmènerons dans les trois derniers mois de préparation :

  • la chasse aux accessoires et aux costumes,
  • le calage de la lumière et de la musique,
  • la construction du décor,
  • l’accueil du public et les ultimes instants en coulisses avant le lever de rideau.

👉 Rendez-vous dans l’article « Préparer un spectacle de théâtre amateur en 6 mois : le carnet de bord des Baladins à paillettes suite et fin » pour découvrir comment tout cela se termine… et comment la magie opère enfin sur scène.

En attendant, si l’aventure vous donne déjà envie de vous lancer, vous pouvez découvrir et télécharger gratuitement la pièce « Adultère et Conséquences » sur Rivoire & Cartier – une comédie idéale à jouer en amateur. Plus généralement, vous pouvez aussi découvrir toutes nos comédies.


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